L.V.
Beethoven - Sonate N°14 - Op27 - Moonlight
- Mouv1 - C sharp minor
(Extrait
par Anna)
Les doigts plus courts que la tête
Il
est arrivé dans ma vie
Un
après-midi de novembre.
Sans
smoking, ni queue-de-pie,
Il
n’allait pas au concert.
Il
était venu vers moi
En
sobre tenue noire,
Simple
et élégante.
Comme
il était beau !
Je
l’ai longuement épié,
Admiré
encore, et encore,
D’une
retenue effarouchée,
À
l’ombre d’une timide inquiétude.
Rêveuse,
le sourire déjà aux lèvres,
Je
le contemplais en sourdine,
Mille
morceaux en tête.
Alors
j’ai regardé mes mains,
Aux
doigts si courts,
Si
si je m’en souviens...
Sauront-ils
encore caresser,
Accompagner
la descente
Des
marches de ce noir escalier ?
Et
mes yeux... que liront-ils en lui ?
Surgirait-il
quelques altérations ?
Avais-je
conservé toutes les clés ?
Tant
de secrètes questions...
Je
ne le connaissais pas, pourtant,
Il
ne m’était pas totalement inconnu.
Mais
lui... aimerait-t-il cette rencontre ?
Oh,
je sais bien ce qu’il attend,
Il
est comme tous les autres...
Mon
cœur aussi soupire passionnément,
Mais
cela pouvait-il être suffisant ?
Quarante
cinq ans après...
De
cette lointaine initiation,
J’en
avais gardé tous les papiers certes...
Mais
qu’en restait-il vraiment ?
Certains
semblaient toujours... bien trop noirs,
Triples
croches, bécarre, et clé de fa...
Trop
peu de doigts et pas assez d’yeux !
Inaccessibles !
Pourtant,
c’était bien là ma précédente aventure
Avec
un bel ami, son congénère, son frère...
Et
si ces retrouvailles étaient une bêtise ?
Recommencer
une telle histoire d’amour
À
la veille du troisième âge,
Est-ce
bien raisonnable ?
Trop
tard pour y penser,
J’avais
fait le premier pas vers lui,
Nécessairement,
le deuxième devait suivre.
J’ai
ouvert « La Méthode Rose »
Raccommodée,
scotchée, si pâle.
Comme
si je reglissais mes mains
Dans
les gants que je portais petite fille,
Me
suis approchée du noir désir.
Page
6 : « Les cinq doigts »
Page
8 : « Études rythmiques »
Dix
fois, vingt fois,
« Répétez »
dit le maître...
Ses
portées étaient à la mienne.
À
la nuit, je m’arrêtais au « Chant du Soir » page 33.
Radieuse,
j’avais dix ans
À
nouveau...
Enfin
je te retrouve, Ludwig,
Au
clair de notre lune préférée...
Ah
la mémoire auditive,
La
mienne meilleure que la tienne ?
Prétentieuse,
je n’en suis pas si sûre...
Mémoire
procédurale de mes doigts,
Enchaînements
ravivés. Magie !
Ma
tête affabule encore,
Bach,
Debussy et Ibert...
C’est
beau la machine humaine.
Mais
j’ai toujours les doigts trop courts...
Anna
Logon – 15 Janvier 2014 ©
Tout comme j'aime!! Ce piano qui trouve tes doigts suffisamment longs, cette voix joyeuse, mutine, Beethoven et bien-sur ce très joli texte qui chante, qui chante...Merci pour ce moment de grâce!
RépondreSupprimerOh mais je n'avais pas remercié notre chef d'orchestre ! Merci Tippi Bisous ♥
RépondreSupprimerUn grand sourire Anna ! Ce texte m'a enchantée et transportée ... chez moi ! Et zut à moi qui n'ai pas su honorer mon bel ami noir et blanc ni d'ailleurs sa copine Clari Nette !
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