MISE EN VOIX MARCEL FAURE
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Jeudi
17 novembre 2011
Un
grand bruit dans ma chambre. Je me réveille en sursaut. Dommage, je
flirtais avec l'éternité, une éternité fraternelle dans un décor
feutré et vaporeux ... Et patatras.
— Ça fait mal.
— Ça fait mal.
Dans
un halo bleuté un grand escogriffe barbu et ébouriffé se masse le
genou en marmonnant.
—
Comment dis-je, en prenant le ton de quelqu'un que plus rien
n'étonne.
—
j'ai perdu l'habitude d'enfiler un corps d'homme. Suivez-moi dit-il
d'une voix si impérieuse et autoritaire que nul n'oserait le
contredire.
Maintenant
plus du tout rassuré, je murmure :
—
Qui êtes-vous ?
—
JE SUIS DIEU tonne-t-il
J'étais
donc en présence de la Majuscule suprême qui venait de pénétrer
par effraction dans mon intimité. Moi qui suis athée, je venais de
prendre un sérieux coup sur la tête.
Et
de m'expliquer : vous comprenez jeune homme (évidemment, par rapport
à lui ...) comme promis dans les textes sacrés, je veux vous
envoyer mon fils une seconde fois, mais avant je souhaite m'assurer
que vous n'allez pas me le trucider à nouveau, parce que,
honnêtement c'était pas vraiment écrit cette histoire de croix. —
Là je carpe un peu de la bouche. — Et comme s'il lisait dans mes
pensées ... j'espérais bien dit-il que cette fable d'Abraham et de
son fils aurait été comprise, mais voilà ... suivit d'un long
silence.
—
Vous allez me servir de témoin, partons réveiller tous ces papes
qui devaient préparer l'avènement pour les remettre au boulot.
Et
nous voilà parti, chevauchant de tombeau en tombeau, soulevant une à
une toutes ces pierres de marbre, réveillant un à un les vénérés
Saint Pères, les catholiques, les orthodoxes, les pas très
orthodoxes, les déviants, les assimilés, les Grands Rabbins, Le
Prophète, les gardiens de La Mecque, tous les tenant d'un Dieu
Unique, avec pour seule consigne, un grand rendez-vous au sommet du
Sinaï.
Il
s'agit de rétablir la seule vérité qui compte, m'explique-t-il
lorsque nous abordons les premières pentes de la montagne sacrée,
celle qui ne devrait même pas être un commandement, mais une
évidence, aimez-vous les uns les autres.
Rassuré
sur ses intentions par cette dernière phrase, j'ose enfin lui
rappeler que je suis athée.
—
J’avais besoin d'un témoin impartial.
Que
croyez-vous qu'il advint. Tous ces saints pères, ces sages déplumés
n'eurent qu'une seule hâte, celle de retrouver les attributs de leur
défunte autorité. Qui sa crosse de fougère, pour les moins
belliqueux, son gourdin pour les moyenâgeux, sa crosse de fusil
pour les va-t-en-guerre, son chandelier massif et contondant pour les
tenants de la vieille tradition. Arrivés en haut du Sinaï nous les
trouvâmes en piteux état.
Avez-vous
entendu la colère de Dieu ? Moi si. À coté, l'explosion d'un
volcan, c'est de la bibine de chats. Craignez, craignez, le Châtiment
de Dieu.
—
Je vous condamne à vivre éternellement sur terre, hurla-t-il.
—
Merci du cadeau, dis-je, en contemplant les bannis toujours à
s'étriper.
Épuisé,
il ne me répondait pas. Nous survolions la terre et pour me
remercier, il me la laissait entrevoir tel qu'il l'aurait voulu, la
perfection ronde, la splendeur blanche, la merveille azurée, la
luxuriance verte, l'immaculée transparence de l'eau ... et soudain,
cette question :
— À qui faut-il s'adresser pour devenir athée ?
— À qui faut-il s'adresser pour devenir athée ?
Vendredi
18 novembre 2011
Si nous étions immortels, par manque de place, il faudrait arrêter
de faire des enfants.
Samedi
19 novembre
2011
Suis-je
vraiment
coincé
dans
cette
époque
?
D'un
point
de
vue
purement
matériel
certainement.
Physiquement
je
me
contente
d'y
prendre
le
soleil
et
j'ai
de
l'empathie
pour
ce
monde
un
peu
fou.
Mais
je
me
réinvente
hors
des
ornières
et
de
la
boue.
Je
chante
l'univers
et
l'univers
me
chante,
dans
tout
ce
qu'il
a
de
jubilatoire
et
d'espoir,
la
sphère
lisse
du
bonheur.
Aimer
les
embruns
de
tes
yeux
autant
que
le
clair
de
tes
rires,
l'amer
de
ton
sourire,
comme
la
vivacité
joyeuse
de
ton
regard.
Le
froid
et
le
chaud,
le
sucré
et
le
salé
attisant
mes
désirs.
Oser
le
monde
plus
beau
pour
toi,
pour
nous,
pour
nous
tous.
Vu
d'ici,
de
ma
tour
si
banale
et
pourtant
si
multicolore,
j'observe
tous
ces
liens,
fils
d'or
entre
les
hommes
qui
se
créent
un
chemin
dans
le
labyrinthe
des
maux.
Petits
gestes
ou
grandes
solidarités,
c'est
égal.
Toujours,
quelqu'un,
quelque
part,
tend
une
main,
offre
un
sourire,
échange
quelques
paroles
gentilles,
transmet
son
savoir,
comme
çà,
gratuitement.
Ils
ne
sont
pas
de
leur
époque.
Ils
dansent,
ils
chantent
que
rien
n'est
écrit.
Dimanche
20 novembre
2011
Le
désespoir
est
un
état
d'esprit
qu'il
faut
combattre.
Sûr,
la
vie
n'est
pas
drôle
pour
beaucoup
d'entre
nous,
chômage,
pauvreté,
conditions
de
travail
inadmissibles,
handicap,
santé
...
qui
provoquent
l'angoisse
du
lendemain,
mais
aussi
brisent
les
couples,
et
rejettent
dans
la
marge
bien
des
enfants.
Pourtant
des
gens
surnagent.
Jamais
ils
ne
renoncent
à
vivre.
Ils
continuent
d'aimer.
Ils
sont
des
joyaux
que
jamais
aucun
tas
d'ordures
ne
réussit
à
avaler.
Et
surtout,
ils
gardent
leur
cœur
ouvert,
ils
aident,
ils
s'entraident.
Ils
refusent
cette
sorte
d'assignation
à
résidence
que
leur
impose
leur
condition
précaire.
Oh, le désespoir, ils le connaissent bien, et l'abattement qui va de pair aussi, mais jamais ils ne pleurent sur eux-mêmes, mais sur les autres.
Oh, le désespoir, ils le connaissent bien, et l'abattement qui va de pair aussi, mais jamais ils ne pleurent sur eux-mêmes, mais sur les autres.
Et
cela
change
tout.
Le
désespoir,
ils
le
pulvérisent
d'un
sourire.
Tous
les
jours,
ils
renaissent.
Ils
éclairent
avec
constance,
avec
acharnement.
Ils
me
guident.
Souvent
je
suis
triste,
c'est
vrai,
mais
désespéré
jamais.
Alors
je
fais
ce
que
je
sais
faire
un
peu,
quelques
lignes
pour
eux,
pour
cette
joie
qu'ils
dispensent,
pour
cette
présence
d'humanité
au
cœur
de
la
tourmente,
pour
cette
fierté
qu'ils
me
donnent
d'être
un
homme
parmi
les
hommes,
pour
eux
et
pour
tous
ceux
aussi
qui
oeuvrent
avec
eux.
Le
désespoir,
ce
n'est
qu'un
sourire
qui
a
pris
un
coup
de
couteau,
et
chacun
d'entre
nous
peut
suturer
la
plaie
en
partageant
le
sien.
Lundi
21 novembre
2011
Quelqu'un
gratte
à
ma
porte.
Toutes
timides,
trois
petites
frimousses,
mes
trois
petites
mouettes
rieuses
du
matin.
S.O.S.
devoirs
en
détresse.
Mes
petites
grabotes
s'installent
autour
de
la
table,
Camélya
l'appliquée,
Nadège
la
pressée
d'en
finir,
et
Mélina
la
curieuse.
Du
français
et
des
maths
...
Si
je
comprends
les
questions
!
Bon,
me
voilà
lancé
dans
la
technique
opératoire
!!!
???
J'ignorais
totalement
que
l'on
commençait
médecine
dès
l'école
primaire.
Ouillouiiouille,
bobo
ma
tête,
chacune
à
son
tour,
Camélya,
passe-nous les
bonbons
pour
nous
donner
des
forces.
Il
me
faut
trouver
des
mots
simples,
très
simples
pour
mes
oisillons
ébouriffés,
aux
yeux
ravageurs
et
avides.
Lloydia
qui
a
toujours
été
très
à
l'aise
avec
les
enfants,
peste
à côté de
moi,
rajoute
son
raisonnement
sur
le
mien,
mais
sa
vue
...
On
aura
appris
quelques
mots
nouveaux
après
avoir
bataillé
entre
doudou
et
nounours,
enfin
un
ours
brun
ton
doudou
Nadège,
qui
mange
du
saumon
(un
poisson
Mélina)
et
se
promène
sur
la
banquise
lorsqu'il
est
blanc.
Et
oui,
comme
les
hommes,
les
ours
sont
de
toutes
les
couleurs.
La
banquise,
Nadège,
c'est
un
très,
très
gros
glaçon,
oui
comme
ceux
du
frigo,
mais
des
milliards
de
fois
plus
gros,
qui
flotte
sur
l'eau.
Un
milliard,
c'est bien
plus
grand
qu'un
million.
Maman
qui
n'aime
pas
savoir
ses
petites
chéries
loin
de
ses
jupes
revient
pour
la
deuxième
fois
les
récupérer.
Dommage
les
filles,
on
fera
des
desseins
une
autre
fois.
— J'te dis tu prends, dit-elle, en insistant pour que j'accepte un sachet de petits pains sous plastique en provenance du discount le plus proche.
— Si t'as déjà, ti mets au congel.
— Qu'il est bon ce pain, même s'il joue un peu à l'élastique sous la dent.
— J'te dis tu prends, dit-elle, en insistant pour que j'accepte un sachet de petits pains sous plastique en provenance du discount le plus proche.
— Si t'as déjà, ti mets au congel.
— Qu'il est bon ce pain, même s'il joue un peu à l'élastique sous la dent.
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