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mercredi 18 juin 2014

MATHIEU JAEGERT - VOUS AVEZ DIT FAUXSUMÉRISME ?







Sept, huit, neuf, dans mon panier neuf...



Vous avez dit fauxsumérisme ?





Partons du postulat incontestable que consommer est source de bonheur. Alors bien sûr, ça n’a rien d’indiscutable, mais vous comprendrez aisément mon recours à cet axiome une fois arrivés au bout de la brillante analyse sociétale qui suit. Oui, je sais, sociétal fait partie de ces néologismes aux sonorités barbares qui pullulent dans nos dictionnaires. Soit. Si vous voulez bien, on va passer outre et avancer sur un phénomène nouveau suscitant justement l’intérêt de ces inventeurs de mots et façonneurs de tendances. A ne plus savoir d’ailleurs qui de la tendance ou du terme arrive le premier.



Bref, si l’acte d’achat procure du plaisir, il est souvent contrarié chez des jeunes dont les cordons de la bourse deviennent inutiles tellement celle-ci se vide, entraînant un malaise palpable. Certains ont toutefois trouvé la parade, en recomposant de toutes pièces ce paradis artificiel de la dépense. Pour recréer le sentiment de satisfaction généré par l’achat, ils font semblant de consommer. Comment ? Rien de plus simple ! Et c’est justement de rien qu’il s’agit, puisqu’ils garnissent des paniers virtuels de produits qu’ils aimeraient tant posséder. Evidemment, ils se font accompagner vers la guérison par ces bienfaiteurs patentés qu’on n’est pas étonnés de retrouver là : les agences de marketing. Jamais avares d’un bon conseil et pris d’un élan habituel de philanthropie, elles ont d’abord mis un nom sur le mal-être. Ou plutôt un néologisme sur ce que ces jeunes apparentent à tort à une mauvaise passe. Le phénomène a été baptisé « fauxsumérisme » au cours d’un brainstorming intense mais complètement désintéressé, cela va de soi. Le fauxsumérisme, donc, ou l’art de remplir listes, paniers et autres agendas de vide, de néant et d’autres possibles pour donner l’air et l’impression de. De quoi ? De vivre, d’être heureux ou d’être tout simplement. Un faux-semblant, en réalité, censé les guider vers la concrétisation de l’achat.



Ces agences ont très vite fourni à ces jeunes avides de biens, des paniers en tous genres et à la qualité douteuse. Mais peu importe leur état, lorsqu’on y met du vide, difficile de se montrer regardant ! Le concept ne présente que des avantages. Finis les débats sur les soldes. Puisque rien n’est acheté, les remises sont remisées. Le néant possède un atout majeur par ailleurs, même lorsqu’on pense avoir rempli son panier de vide, il reste toujours de la place !



Bien sûr, l’idée des marques est de créer l’accoutumance au rien, au vide, pour que ces jeunes sans le sou passent un jour à l’acte d’achat libérateur et choisissent leurs produits. Ces vêtements, appareils high-tech et autres accessoires sont alléchants quand ils ont l’air de rien, et vite remplacés une fois achetés. C’est précisément là-dessus que toutes les sociétés misent. Les cibles foisonnent aux quatre coins du globe, consommateurs nomades en devenir, pas uniquement made in China !



Le fauxsumérisme, c’est aussi la seule tendance permettant d’affirmer fièrement : « J’ai un gros pouvoir de non-achat ! ». Cela dit, attention, il s’agit de ne pas non-dépenser à tout va car, comme le dit si bien – et de manière totalement incompréhensible, je vous l’accorde – la formule : « Bien mal acquis, bien mal y dépense ! »




dix-huit, dix-neuf, vingt...mon panier de rien


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sur le blog de Mathieu Jaegert

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