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mardi 2 septembre 2014

MARCEL FAURE - 0131 à 0135 de La danse des jours et des mots





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Mardi 31 janvier 2012 

            La ressemblance avec une rose de la jeune femme du 3ème est frappante. Jamais je ne le lui dirai parce que, question caractère, il lui pousserait certainement quelques épines supplémentaires. Alors, lorsque je la croise dans l'ascenseur, j'accroche mon sourire à mes chaussures pour en vérifier les lacets.
            Une fois, j'ai eu cette audace de la regarder. Droit dans ses yeux, mon sourire. Balayé d'un revers de mots secs et blessants :
            - Nous n'avons pas gardé les cochons ensemble, vieux sadique.
        Heureusement Madame, heureusement, pensais-je très fort, la pauvre truie en eût accouché prématurément.
            De plus en plus de gens, malmenés par la vie, se sentent agressés sans raison. Quel gâchis !



Mercredi 1er février 2012 

L'investigation de ma vie ne laisse que peu de place au mystère. Elle est tellement linéaire et si peu vagabonde. Enquêter à l'intérieur de mon cerveau, par contre... Je m'y perds si souvent. Une connexion non consciente me pousse parfois dans des contrées où la violence règne en maître. J'ai peur de moi.
Vite je referme cette porte. Je voudrais définitivement rompre le contact avec la bête, mais c'est elle qui me rappelle tout le chemin parcouru et celui qu'il me reste à faire pour avoir vraiment le droit de dire "tu" à la vie.
J'allume ma lampe frontale. Je te vois.
- Tu dormais ?
- Non, j'étais à l'extrême bord de moi, dis-je en frissonnant.



Jeumermanche 32 du mois 33 

Une date imaginaire pour chapeauter les quelques jours qui suivent.

J'ai déjà abordé vaguement le sujet des sites de poésies où je publie mes poèmes. Je croise mes mots avec des gens. Des liens se nouent avec certains. Peu à peu ils se transforment en une complicité proche de l'amitié et nos échanges débordent souvent du sujet qui nous rassemble.
Nous faut-il un alibi pour écrire ? L'alibi de l'œuvre littéraire à construire, celui de la langue à sauvegarder, du message à transmettre...
La plupart d'entre nous, écrivains du Dimanche qui musardons sur les sentiers de la création, nous n'avons que l'alibi du plaisir et cette rage de l'expression qui nous porte, nous emporte au-delà de nous même.
Avec Galatéa belga, pseudo d'une nymphe sicilienne qui vit en Belgique, nous échangeons de petits bonjours matinaux où il est souvent question de hérons, de brumes et de la soif de vivre. Nous aimons cette musique des mots sur la portée des ondes. Parfois, il nous faut dire aussi notre désarroi, lorsque notre cœur écorché s'empêtre dans la banalité qui fait irruption dans ce que nous lisons. Tous les jours nous devrions nous indigner, mais il faut bien que la misère culturelle s'exprime aussi et nous sommes aussi assaillis par la tendresse envers tous ceux qui n'ont pas les mots pour dire.
Malgré ses difficultés dans notre langue, Galatéa fait l'effort de s'exprimer en français. En la lisant, c'est comme si j'entendais sa voix chantante au creux de mon oreille. Et même dans sa révolte, il y a comme une douceur maternelle, une fluidité mélodique, une bienveillance...
De la révolte ? Non, je devrais plutôt parler d'une sorte de manifeste poétique qui pourrait se résumer à : J'écris comme je suis et je vous lis ainsi.
Je vous laisse découvrir nos échanges en commençant par son message poème.



Jeudi 2 février 2012 

Pourquoi je ne peux pas sortir avec Mr. Alexandrin.

Je comprends les poètes qui aiment, recherchent et se réfugient dans les bras immortels de l’alexandrin.
Ils trouvent de la musicalité, de la mesure, du rythme, des confins rassurants et anoblissants pour leurs pensées.
Il y a un subtil plaisir quand on manipule la beauté, on assemble ses fragments choisis, élaborés pendant notre évolution culturelle et qui sont “classiques “.
Ce n’est pas indispensable s’exprimer avec la patine du beau temps qui fut, mais c’est aussi agréablement titillant se mélanger avec les autres, habillés de mots de soie, des tissus souples, si bien expérimentés qui ne creusent et se présentent impeccables, n’importe l’occasion, l’humeur, la rage ou la tristesse.
Revêtus de mots sélectionnés, ciselés, on montre une façade de respectabilité qui invite à l’admiration et à une forme d’imitation de bonnes manières.
L’alexandrin, les formes classiques françaises sont en effet l’haute couture de la poésie. Le Chanel numéro 5 qui peut fait tourner la tête à l’aimant du parfum d’autrefois.
En lisant ces vers d’haute lignage, en découvrant leur parfait alignement, on peut ressentir les frissons de la certitude mathématique.
Ce sont beaucoup ceux qui recherchent, désirent au moins une fois par jour trouver de l’ordre, car la vie nous chamboule et jette en l’air soudainement nos points d’appui.
C’est humain le besoin d’ordre, de trouver notre essentiel à la juste place, à l’aveugle, sans étranges migrations de sens et de forme.
Le beau déjà expérimenté, la routine, la reproduction dans les schémas rassurants sont donc une aspiration assez commune, liée à la personnalité de qui écrit ou lit et sait manipuler, avec précision, une matière qui devient encore plus ductile et source de satisfaction quand entre dans le plan préfixé d’une composition.
Mais en écrivant on peut rester la personne que nous sommes quotidiennement comme on peut changer et désirer ouvrir la porte à une partie de nous qui nous appartient, mais que plus difficilement nous savons faire agir dans notre vivre.
Ma rébellion cachée aux règles, par exemple, se montre en plein quand je compose.
En écrivant de vers, je deviens sauvage, incapable d’accepter des brides qui ne sont pas les miennes.
Chaque poème que j’écris suit seulement les limites, les confins de mon souffle qui s’arène là où ma spontanéité, ma sincérité m’emmènent.
C’est pour cette raison que je ne suis pas capable de modifier mes écrits après quelques jours.
Un poème écrit, une fois fini l’élan, est hors de moi, avec une fermeture mentale et émotionnelle qui m'empêche de le rouvrir et le transformer.
Peut-être dans mon DNA(ADN) manque la gêne qui me fait vibrer quand je lis la perfection numérique plus que la sincérité de l’autre.
J’ai encore en moi la marque que certains fragments de poèmes ont laissée en moi il y a longtemps ou récemment.
En général, j’ai compris, ils sont extraits de compositions libres que je mémorise aussi plus facilement pour leur vers qui forment une image irrégulière et donc pour moi, plus facile à retenir.
Mais c’est aussi leur caractère unique, les mots apparemment moins galets polis, qui font une trace dans mon réservoir d'émotions.
Comme lectrice je ne désire pas seulement boire un verre de belles lettres, je veux du jus frais qui contient les sels minéraux de son auteur. Son arôme spécifique, son rythme intérieur non reproductible par un autre.
J’aime découvrir les mots traces d’un passage inconnu, diffèrent, sur ce même sol, avec des tournures et des sources d’illuminations particulières qui mettent en relief un coin, un mot d’expérience humaine pour moi encore inexplorée. Vierge.
Donnez-moi un accent, une transparence, un fil pour coudre lambeaux d'émotions et je couvrirai mon être éternellement de ce drap-patchwork volé, lecture après lecture aux autres, aux souffleurs de vertiges, aux sculpteurs de la fantaisie.
Galatéa belga.




Vendredi 3 février 2012 

 " En écrivant de vers, je deviens sauvage, "
O ma belle sauvage, dont le mélodieux accent italien s'entend en lisant vos poèmes, savez-vous qui vous donne raison ?
Tous les surréalistes qui se souciaient peu de la forme, mais dont la poésie, parfois trop expérimentale, perd un peu de son sens, mais aussi toute la poésie expérimentale moderne qui pousse encore plus loin l’absence de sens au point que l'on en regrette parfois ce bon vieil alexandrin. Un certain nombre de poètes modernes, après en avoir fait l'expérience, reviennent d'ailleurs à une poésie plus classique.
Attention cela ne veut pas dire que l'on peut écrire n'importe quoi et appeler cela " poésie " comme c'est trop souvent le cas dans nos lectures quotidiennes des productions du site. Il y en a un peu marre des amours toujours, salaud tu m'as quitté ou des Dames nature, du sable fin et des yeux bleus. La poésie, c'est évidemment dire cela mais elle mérite beaucoup plus que ce genre de banalités.
Enfin encore pour vous donner raison deux citations.

Léo Ferré : Le poète qui compte sur ses doigts est un dactylographe.

Paul Valéry : la forme coûte cher.

Amitiés d'un vieux croûton qui essaye d'écrire mais se trouve souvent bien plat lui aussi.
Marcel.


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