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mardi 22 juillet 2014

MARCEL FAURE - 0101 à 0105 de La danse des jours et des mots


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Dimanche 1er janvier 2012 



Ô ma muse mémoire, que sera la moisson cette année ? Orphée sera-t-il le chantre de mes jours ? J'éloignerai de moi toute idée de l'enfer. Se souvenir, est-ce se retourner ?
Ô ma muse ensemence mes mots de fontaines jaillissantes, de frondaisons secrètes et de fenêtres ouvertes. Pénètre ma maison aux quatre vents offerte. Viens murmurer des ombres écarlates sur le festin des jours.
Ô ma muse, embrase mes élans. Transporte-moi vers ces îles lointaines d"épices et de corail. Les flammes enchanteresses, le soir, grésilleront d'étoiles.
Ô ma muse tranquille, par-dessus mon épaule, corrige mes erreurs et mes égarements, ces graffitis informes sur la page pour te décrire, cette ébauche indigne de ta beauté.
Ô ma muse effrontée, déshabille mon rêve que je le touche de ma réalité. L'écume au bout des doigts je te dessinerai la vague et la mer et l'envoûtante langueur de la douceur de vivre.





Lundi 2 janvier 2012




Cette vieille histoire de maquereaux qui refait surface. C'est à cause du téléphone. Quelqu'un jette des mots sur la ligne. Je ferre d'un coup sec et hop je ramène une boite de maquereaux à la moutarde toute penaude au bout de l'hameçon.
Surréaliste mon histoire ? Attendez, j'explique.
La sœur aînée de Lloydia est atteinte de téléphonite aiguë, une maladie assez répandue et qui se propage comme une pandémie depuis l'avènement des forfaits illimités. Lorsque son appel survient aux alentours de 19 heures, c'est dire que nous ne sommes pas près de manger. Je patiente une heure, deux heures, deux heures cinq... je résiste, deux heures dix... je craque. Et je me jette dans les réserves pour ouvrir sur le champ ces fameux maquereaux en boite, pour les dévorer à même la boite au risque de me couper un morceau de langue.
La grande bavarde, informée du fait et incapable de réduire la durée de ses appels, m'a offert un Noël, cette conserve pour reconstituer mes réserves. Cette histoire a fait le tour de la famille et des amis. Depuis, régulièrement, soigneusement plié dans du papier cadeau, mes maquereaux rappliquent.
Belle sœur, vas y, jette toi sur ton combiné, compose notre numéro. J'ai du stock. Je ne mourai pas de faim.






Mardi 3 janvier 2012 



Je ne suis qu'un vieux maquereau qui a mis ses muses sur le trottoir. Douze mots, s'il vous plait, douze malheureux mots pour un petit poème. Lustrez vos pommettes, chaussez la jupe fendue et au boulot les filles.
Allez y Calliope marchez la première et haranguez la foule. Clio passez donc la sébile des siècles, Erato voyons rhabillez vous il y a des enfants, et vous Euterpe, sur votre lyre, jouez pour que danse Terpsichore. Melpomène restez un peu en retrait, je n'ai pas envie de drame aujourd'hui. Polymnie, c'est à vous mimez la comédie écrite par Thalie. Plein de votre folie joyeuses amies, je partirai avec Uranie visiter Uranus.



Douze petits mots pour un poème
Fantasques et bohèmes
Toute ma vie





Mercredi 4 janvier 2012 




Mon frère si fragile, toi qui connais le nom des sources, sous tes pieds nus, tu comptes un à un les grains de sable du désert. Tu vis sobrement dans l'angle perdu des siècles, à la lisière des mondes et des cultures.
Mon frère si noueux, si sec, tu suis encore les étoiles pour trouver l'oasis et tu tangues inlassablement sur ta chamelle préférée, jonglant avec tes réserves d'eau et les prochains jours de marche.
Tu racontes parfois ce fou de Théodore, un blanc celui-là, si vieux et presque transparent, qui cherchait désespérément une plante pour en sauver une autre. Et ramassait parfois un caillou disant – c'est un morceau d'étoile.
Mon frère, qui sait l'arche lézardée de la terre et qui économise jusqu'à ton souffle pour survivre entre les roches nues, griffées par le vent, lorsque je descends ma poubelle débordante d'inutiles, je trie la moindre miette et je la répartis comme il se doit, parce que je t'aime pour toutes les leçons de vie que tu nous donnes.
Mon frère si fort, toi qui rêves parfois de pluies lorsque la nuit recouvre la maigre palmeraie, je ne sais pas pourquoi aujourd'hui je pense à toi. Et si tu me maudis souvent, toujours ta porte s'ouvrira pour moi, l'étranger inconsistant.






Jeudi 5 janvier 2012 




J'ai toujours rêvé d'un voyage au long court, avec pour seul bagage un sac à dos et pour compagnon, cette vieille paire de jambes maintenant un peu rouillée. Partir de la maison, faire le tour de la méditerranée, se perdre d'oasis en oasis, pour aller buter un soir sur la pointe de l'Afrique.
Assis dans mon fauteuil, il est facile d'aller s'engloutir dans la beauté du désert. Traverser les saisons sur le lacis des routes, un courage que je n'ai jamais eu. Alors je voyage de visage en visage et je regarde parfois si fort que j'en suis impoli.










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2 commentaires:

  1. Ô ma muse... que je l'aime celui-là...
    et pour de plus légères raisons, les boîtes de maquereaux... (une préférence vin blanc personnellement...). Je ne dois pas téléphoner assez pour en avoir toute une collection dans mes placards... !
    Merci pour cette mise en voix

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  2. La muse est bel et bien là, présente ! Preuve en sont ces textes surréalistes, des maquereaux en passant aux muses de l'antiquité, on la devine, elle est là, présente dans les douze mots, au détour d'un voyage, oui elle est là entre chaque phrase la poésie et c'est tout bénéf' ! Une belle évasion au pays de la fantaisie, bravo et casquette bien bas, un régal à consommer sans aucune modération !!! Bravissimo cher ami des mots et à toi Tippi qui, comme à ton habitude habille nos récits d'une autre dimension !!! Merci pour cette évasion

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