Pages

mardi 22 avril 2014

MARCEL FAURE - 0036 à 0040 de La danse des jours et des mots


CLIQUER SUR LA VIDÉO SONORE







Vendredi 28 octobre 2011 

La lune encore, mais avec Lloydia un soir d'été près d'un étang. Plus tout à fait la même lune et pourtant ... la lune, l'étang, dans les poèmes, les romans, dès les premières rédactions, dans une correspondance, un écrit religieux, un décor de théâtre, partout. Pourquoi le dire encore ... la lune, l'étang, c'est beau. Les illusions sont dans notre tête, pas dans la nature.
La lune qui se faufile au-dessus d'une clairière. Un cerf brame. Une biche s'esquive. Tout ce que nous ne voyons pas est aux aguets. Deux seules alternatives, la fuite ou fondre sur nous.
Lloydia et moi, comme la lune, silencieusement, nous regardons avant de poursuivre jusqu'au chalet. Indifférent à notre passage, nul n'a bougé.



Samedi 29 octobre 2011

Cet après-midi, nous emmenons deux amis jusqu'à Saint-Héand, pour assister au concert de la chorale Récréation. Ginette petite souris esseulée aux oreilles vieillissantes, et Yann, dont les yeux ne voient plus q'un mince filet de lumière au centre de la rétine. Dialogue curieux entre ces deux êtres qui ne se rencontrent que lorsque nous les invitons ensemble.
Ginette déballe de son sac toute une documentation d'activités faites ou à faire. Yann très technique, embraye dès que l'occasion se présente, sur un " comment çamarche " parfois confus, parfois très précis.
En sortant de la salle Ginette nous parle de ce qu'elle a entendu, l'harmonie des voix, le choix des chansons, l'accompagnement et Yann de ce qu'il a vu, le mouvement des choristes, les changements de lumière.
Marie D passionnée de chant, descend de scène en fin de spectacle et vient faire admirer son costume. Lloydia distingue enfin les couleurs de la corolle qui orne son cou, Yann touche la fleur de tissus dans ses cheveux et les bracelets soyeux autour des poignets et des chevilles. Elle se décrit : longue robe noire, tour de cou blanc et mauve, fleurs et bracelets mauves.
L'instant d'avant volubiles, maintenant silencieux devant cette délicate attention et Ginette soudain ...
— À la maison de retraite ils ont aussi une chorale, enfin c'est plus pour les occuper qu'autre chose ...
Ginette parle, parle, une façon d'éviter les questions que ses oreilles entendraient mal. Pourtant au retour, dans la voiture chacun se plonge dans ses souvenirs. Les chansons tracent un nouveau chemin et réveillent des bonheurs d'autrefois.


Dimanche 30 octobre 2011 

Dans nos pays "civilisés", jamais nous n'accepterions, après une catastrophe naturelle, de laisser vivre les victimes dans les mêmes conditions que les sans-abris que nous côtoyons quotidiennement.
Lloydia s'indigne, s'insurge, jamais ne se résigne. Très poétique de dormir en plein été à la belle étoile. C'est une aventure qui nous laissera des traces. Mais en plein hiver ... Nos consciences engourdies. Nos utopies se dérobent. Une petite pièce ou un gros billet, notre générosité tombe dans la sébile sans résonner.
De nombreux immeubles sont vides. Tous les prétextes sont bons pour en refuser l'accès, mais les deux plus souvent invoqués l'insalubrité et le manque de sécurité. Personne n'explique comment nos rues mal entretenues ne peuvent-elles être salubres, ni en quoi elles seraient plus sures qu'une installation électrique vétuste qui risque de provoquer un incendie. L'odeur de la chair brûlée nous insupporte plus que le cadavre gelé d'un clochard. On croit rêver.
Chaque jour ma blessure suppure, chaque jour, je cautérise à l'oubli. Quelle lâcheté.



Lundi 31 octobre 2011 

Depuis ce matin, paraît-il, nous sommes une équation à sept milliards d'inconnus.



Mardi 1er novembre 2011

La joie du paysage maintient la transparence de l'air. Chaque plante respire et pose son souffle dans nos bronches. Échange permanent entre tout ce qui vit. Ces choses simples auxquelles nous ne pensons jamais. Nos poitrines se soulèvent, nous respirons.
Un air que nul brevet ne protège ... à notre disposition, gratuitement. Gratuitement ? Quelle hérésie ! Et toute cette chaîne de transformation jusqu'à nos poumons ! Du bénévolat ? Pas si sûr.
Premier novembre, fête des morts. Sommes-nous plus utiles morts que vivant.

Il faudra bien un jour aller nourrir ce qui nous a nourris.





Textes protégés et déposés
sur le site iPagination
 0037

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire