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vendredi 1 mai 2015

DURANDAL - MARIAGE









Mariage




Je ne sais plus quel âge avait Amandine le jour où elle resta scotchée devant cette vitrine dans laquelle deux mannequins habillés comme des mariés semblaient attendre dans la vitrine l’arrivée du convoi nuptial.



Je m’arrêtai, elle serra ma main pour être sûre que je ne bougerais pas avant qu’elle ait fini d’admirer la scène. J’attendis quelques minutes, je ne pouvais pas sacrifier son bonheur de petite fille.

— Dis Maman, pourquoi elle est déguisée en princesse, la dame ?
— Ce n’est pas une robe de princesse, c’est une mariée.
— Pourquoi elle est habillée comme une princesse la mariée ?
— Pour être belle, parce que le curé va demander au marié s’il veut l’épouser et avoir des enfants.
Elle s’arrêta un instant pour intégrer le sens de mes paroles. Je patientai.
— Il dit oui parce qu’elle a une belle robe. Mais si elle n’avait pas une belle robe, il pourrait dire non ?

Ce genre de raccourci étonne par son étrangeté on se demande s’il faut tout reprendre à zéro au risque de casser le monde des rêves ou s’il faut laisser les idées se former toutes seules dans la fraîcheur enfantine.

— C’est un peu comme les oiseaux qui chantent dans le ciel pour trouver un autre oiseau et fonder une famille.
— Mais alors le marié ne doit pas être content le lendemain quand la mariée ne met plus sa belle robe.

J’essayai de lui expliquer dans ses mots qu’ils ne se mariaient pas seulement parce qu’elle était belle dans sa robe de mariée. Elle me demanda de lui dessiner ce qu’était l’amour. J’avoue que je ne sus répondre à sa demande. La robe de mariée, c’était plus simple, elle ne voulait retenir que cela.

Cette vitrine l’impressionna, elle insista pour retourner voir la robe de mariée. Elle en reparlait, me posait une question à l’improviste, je sentais que cela la travaillait. 

Elle me demanda de lui montrer les photos de mon mariage. J’en mis une dans un cadre, elle le gardait près d’elle lorsqu’elle jouait avec ses poupées. Elle ne se lassait pas de la regarder. Elle faisait un lien entre la robe de mariée et sa naissance.

— Si tu avais mis une autre robe, j’aurais été différente alors.


Pour Noël, elle demanda une robe de mariée !

— Pas une vraie, parce que je ne veux pas avoir de bébé tout de suite.

Je cherchais dans le bulletin paroissial la date du prochain mariage et nous y sommes allées toutes les deux, comme des curieuses. Je jouissais du privilège d’être sa confidente. Elle ne quitta pas la mariée des yeux. Sur le parvis, la mariée la remarqua, je lâchai Amandine. Spontanément elle courut vers la mariée pour l’embrasser. Elles étaient émues toutes les deux, des larmes coulèrent sur leurs joues. Je les pris en photo.

— Quand remettras-tu ta robe de mariée ? Mais si tu veux avoir un autre enfant, il faudra bien que tu la remettes.

Elle demanda à son père s’il m’avait trouvée belle en robe de mariée. Il fut un peu étonné quand elle lui demanda s’il voulait qu’elle mette une belle robe «comme maman le jour de son mariage». Flatté, il se redressa pour exciter un peu ma jalousie. Il prit Amandine sur ses genoux et lui dit qu’il serait fier de la conduire à son époux le jour de ses noces. Amandine fut un peu déçue, je crois. Elle repartit vers ses poupées.

Dans son bain, elle me dit sur le ton de la confidence.

— Moi je me marierai avec Louis !


Je jouais la surprise et lui dis que j’avais cru comprendre qu’elle regardait Olivier amoureusement. 


— Ah, non, Olivier, ce n’est pas possible, il est déjà marié avec Sylvie.



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mercredi 1 avril 2015

DURANDAL - LE KALÉIDOSCOPE













LE KALÉIDOSCOPE



Sur la devanture du magasin de ma mère, les passants pouvaient lire en lettres capitales : Jeux pour Salons, Cercles et Cafés. La boutique plus que centenaire servait de point de repère sur le boulevard. Ma mère y vendait toutes sortes de jeu de société, de jeux de cartes, de beaux jeux en bois… Des chariots, des chevaux à bascules voisinaient les échiquiers en bois précieux et les figurines en ivoire. Elle suivit l’évolution du marché et sur les conseils d’un représentant, elle monta un rayon de farces et attrapes.


Elle vendait aussi des kaléidoscopes un peu particuliers. Ils se présentaient sous forme d’un tube dans lequel des formes colorées et géométriques apparaissaient au fur et à mesure que l’on tournait l’appareil. L’orifice obscur devant lequel il fallait placer son œil supportait une feutrine noire. Le spectacle offert par ce tube magique valait le coup d’œil mais ce n’était rien en comparaison du spectacle qu’offrait le client après avoir reposé l’appareil : un cerne noir du diamètre du tube entourait son œil pour le plus grand plaisir des personnes présentes dans le magasin. Le client était le seul à ne pas voir le rond noir sur son visage et il se demandait pourquoi tout le monde riait autour de lui. Ma mère lui conseillait de se regarder dans les miroirs placés au fond de l’étagère. L’effet du kaléidoscope saisissait les plus flegmatiques. Ils lançaient un « Oh ! » dans le magasin. Ma mère arrivait à garder son sang-froid pour ne pas rire. Elle souriait et tendait un mouchoir au client qui riait de bon cœur en songeant aux prochaines victimes de la farce qu’il jouerait chez lui s’il achetait l’objet qui offrait ce spectacle merveilleux. Ma mère conseillait aux acheteurs de frotter le bord de la feutrine contre un bouchon de liège brûlé pour obtenir l’effet escompté.

Ce que je fis, lorsque le premier avril, j’apportai ce tube à merveilles à l’école. Ce jour-là, nous avions une interro de maths sur les repères orthonormés. Je laissais le tube magique sur mon bureau. Le professeur, en blouse blanche, écrivit l’énoncé de l’exercice sur le tableau noir. Nous nous concentrions sur nos copies au bruit des règles et des stylos que nous manipulions pour tracer les axes x et y. Notre professeur passa dans les rangs comme il le faisait à son habitude. Je m’apprêtais à dessiner un cercle lorsque je sentis sa présence à mes côtés. Il saisit l’objet, je levai le nez. Il ne me demanda pas d’explication et regarda à travers l’orifice. Il trompa son ennui quelques minutes, il s’en mit plein les yeux. Il observa l’ingénieux mécanisme de l’appareil. Il le reposa sur mon bureau et me sourit pour me remercier du spectacle. Un beau cercle noir entourait son œil. Je m’efforçai de ne pas rire, comme ma mère savait si bien le faire.


Mais quand il retourna à son bureau sur l’estrade, tous mes camarades éclatèrent de rire. Le pauvre homme vécut un grand moment de solitude. Moi, je me cachai derrière le dos de mon voisin de devant, je rentrai les épaules, je craignais qu’une main géante m’extirpe de mon siège. Un de mes amis eut la bonne idée de crier « Poisson d’Avril » et les rires redoublèrent. Notre professeur ne comprit pas la cause de l’hilarité générale. Je me souviendrai longtemps de son regard qui, je ne sais pourquoi, ressemblait à celui de mon poisson rouge. Le prof restait calme, il souriait ahuri et décoré de son étrange monocle. Il cherchait en vain ce qui dans sa tenue prêtait à rire, il redoutait le pire. Ce fut une élève du premier rang qui lui indiqua que son œil portait un cercle noir. Il prit son mouchoir, se frotta et constata les dégâts. La cloche sonna, je m’enfuis de la classe mais au moment de franchir la porte, j’entendis mon nom prononcé. Je revins sur mes pas et me dirigeai vers l’estrade comme un condamné vers l’échafaud.

Nous restâmes tous les deux dans la salle de classe. Il me demanda de sortir le kaléidoscope. Sais-tu comment fonctionne cet engin, me demanda-t-il ? Non, avouai-je ! Il passa le doigt sur la collerette noire et quand il vit la suie sur sa peau, il comprit le vilain tour que je lui avais joué. Tu vas étudier cet appareil, tu distingueras les axes, des centres de symétrie des rosaces qu’il présente et lundi, tu nous feras un exposé sur le résultat de tes recherches. Il jouait les grands seigneurs, il ne me collait pas, il préférait me torturer.


Et le lundi, sur l’estrade, j’essayai d’expliquer tant bien que mal le jeu de miroirs de l’appareil. Le prof vint à mon secours. Au cours suivant, il me soumit devant la classe à une série d’exercices concoctés par ses soins et il nous donna un devoir non surveillé (dns) sur un secteur du kaléidoscope. Par un fait exprès, les axes et les centres de symétrie collaient parfaitement à notre programme. Mes camarades de classe me bénirent ! Quand le mode de formation des images kaléidoscopiques fut éclairci, il me demanda de dessiner une rosace entière et de la colorer. Je passai un temps fou à repérer les endroits où poser les couleurs justes. Au bout d’un moment je saisis la technique, je faisais tourner ma feuille afin de repérer plus vite les endroits où poser les bons coloris. J’exhibai mon travail devant toute la classe, un oh d’admiration envahit la salle. Le prof me demanda s’il pouvait conserver ma rosace. « En souvenir », me dit-il en souriant. Il l’inséra dans la couverture plastifiée de son classeur et promena mon travail à la vue de tous.



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dimanche 22 février 2015

MATHIEU JAEGERT - BOÎTE AUX LETTRES SE LIVRANT AVEC ADRESSE







Boîte aux lettres se livrant avec adresse


Ma boîte aux lettres prit la parole. Je commençais d’ailleurs à croire que cet acte si banal de la vie d’un récipient postal ne se produirait plus. Ce n’est pas faute de l’avoir incitée pourtant. Si des millions de modèles avaient convaincu nombre de réticents à travers le monde que l’expression orale des boîtes aux lettres devait rentrer dans les mœurs, parler à la sienne restait mal vu. Nous, on adoptait la posture inverse. Quand elle barguignait, moi, je ne ménageais pas mes efforts, tantôt taquin, parfois sur le ton de la confidence. Je lui parlais sans cesse en misant sur le facteur chance, n’en déplaise à mon postier habituel. Le déclic se produisit brutalement, et je ne fus pas déçu.


Elle avait tellement reçu qu’elle envoya du lourd et mit le paquet. Habituée à être livrée, elle se livra sans retenue mais avec finesse. Faut dire qu’elle possède une adresse unique en son genre. Elle disserta de tout ce qu’on lui avait remis et de tous ceux qu’elle ne remettait pas. Son timbre de voix lui ressemblait. Une fois sur les rails, il fut impossible de la stopper, elle fila bon train en experte des correspondances. J’essayai bien d’interrompre sa logorrhée, mais l’entreprise s’avéra inutile, elle ne releva pas. Elle aurait pu m’expédier mais elle s’en tamponnait. Pour une fois qu’elle avait décidé seule de l’ouvrir, rien ni personne ne pouvait contrecarrer son plan. Elle qui était restée boîte bée si longtemps, fidèle à son poste, et au moins autant à sa poste, elle m’en boucha un coin à vouloir mettre les points sur les plis. Sa parole ne s’en trouva que plus libre, affranchie de toutes convenances et codes postaux. Je souris intérieurement. Les derniers sceptiques rentreraient dans le rang illico. Et à tous ceux qui s’étonneraient encore que ces objets puissent parler, je répliquerais :



« Une boîte aux lettres sans voie, ça ne se trouve pas ! »




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Texte à retrouver en cliquant sur cette image
à l'adresse de notre Bandit postal fort recommandé !

Arinsal_Boites_a_lettres




lundi 5 janvier 2015

ANNA LOGON - LA MALÉDICTION D'AMAËL - VERSION COMPLÈTE

Vous avez raté un épisode ? 

Voici donc...


Quatre volets pour Amaël

 Appelons cela le "Streaming" de l'ÉCHO !


1





 2



3





4





Retrouvez ces héros entourés de bien d'autres tout aussi passionnants sur L'Encrier d'Anna Logon



samedi 3 janvier 2015

ANNA LOGON - LA MALÉDICTION D'AMAËL - 4/4


BANDE AUDIO ICI

Voix de l'Écho sur une adaptation de
Zack Hemsey - Mind Heist Evolution


« La Malédiction d’Amaël » 4/4



4

       Le crépuscule camouflait la poussière s’élevant sur le sentier. De grands flambeaux en chapelet s’avançaient serpentant sûrement. Des trompes précédaient le pieux cortège. Le pas écrasant des chevaux portant noirs cavaliers et tirant lourdes charrettes vibraient dans la combe tremblante. Franchissant les murs d’enceinte, les soldats se redressaient sur leurs montures caparaçonnées aux symboles de la Sainte Inquisition, aux grandes oriflammes portant le sceau solaire flanqué des « IHS » tranchés de la croix épée. Les villageois ne savaient désormais plus quelle colère il leur fallait redouter, celle Galia ou du Grand Inquisiteur ?
       Les soldats encerclèrent aussitôt le placître, enflammant de grandes brasières. En génuflexion, le recteur baisait la main gantée de frère Grégoire. Pour toute prédication générale, il harangua la troupe de saltimbanques :
-        « Il y a un ordre naturel en ce monde, celui de Dieu. Quand je marche dans la vallée de l'ombre de la mort, je ne crains aucun mal, car il est avec moi. C’est la seule vérité. Elle est une et indivisible. Je ne vois ici qu’une meute satanique. Nul besoin de procès. Les démons viennent tout droit de l’Enfer et par le feu ils y retourneront ! »
    De grandes brassées de bois furent disposées autour des roulottes, des barriques d’huile répandues par-dessus. Les villageois restaient tapis, craignant les foudres démoniaques de la sorcière et du monstre. Galia apparue aérienne, lévitant demi-nue dans de rouges voiles, les mains dirigées vers le sol invoquant les Enfers. La repoussante pouilleuse paraissait sous les traits d’une jeunesse ensorceleuse aux yeux d’argent et rouge chevelure. Diaboliquement hypnotisantes, ses courbes langoureuses de succube auraient damné tous les saints. Cette maudite sublimité n’en restait pas moins effrayante :
-        « Je vous implore Esprits et Démons demeurant en quelque partie du monde, de l’orient à l’occident. Je sollicite votre puissance donnée par Lucifer. Sur autorité accordée par l’unique et seul roi, je vous contrains sans faillance ni tromperie de répondre à cet appel. Paraissez sur-le-champ au milieu du pentacle ! Sans crainte ni terreur, sans peur de nos ennemis, que ma colère soit vôtre en cette nuit et pour l’éternité !... »
       Les soldats ne tremblèrent pas. Le brasier dévorait déjà bois et lambeaux de rideaux des plus proches roulottes. Se frottant les mains, frère Grégoire se repaissait d’avance du funeste spectacle, les yeux animés de vengeance. Soudain, un vent en rouge tornade se leva au milieu de l’anneau de feu. Sans répit, les tourbillons s’amplifiaient. Cet ardent chaos fracturait les dalles. Les ténèbres s’ouvraient libérant les puissances invoquées. D’ignobles créatures se dressaient face aux armes : démons fouettant l’air des feux de l’Enfer, diablesses affriandant les soldats, Arioch lui-même surgit dans son incandescente crinière. Le brasier grossissait. Un instant effrayés par ce débordement machiavélique, les divins serviteurs n’écoutèrent que leur courage. Les lances se dressaient avides de justice. Les pieux embrochaient les poitrails. L’odeur du sang, la chaleur de l’acier attisaient ce déferlement bestial. Des flèches d’arquebuses fusaient au milieu du sabbat. Pertuisanes et bardiches tranchaient les membres. Les premières têtes roulaient sur le sol. Les flammes du bûcher, mêlées à celles des enfers, devenaient colossales. Ceux qui n’étaient pas encore morts périrent brûlés vifs. D’autres poussaient d’atroces hurlements. Les candides clowns flandrins dansaient sur les braises en riant. Tancrède s’embrasait devant les restes calcinés d'une roulotte. Mais les démons s’éternisaient dans la fournaise. Tripes et corps démembrés jonchaient la pierre.
      Brusquement, une lumière bleutée déchira la nuit, tel un céleste aiguillon illuminant la plus puissante des mains armées de l’Inquisition. Un paladin, l’ultime bouclier quand tout exorcisme échoue. Galfayar se dressait face à cette vile félonie. La reine des ténèbres, psalmodiant à nouveau son venin, attisait les démons. Ils se regroupèrent en un seul sombre cyclone. Apparut alors le plus cruel des balrogs. Le déchaînement fut titanesque. Les lames mordaient les chairs. Bien et Mal s’affrontaient en foudres surnaturelles. Aucune mémoire d’homme n’avait souvenance d’un tel cataclysme. Le balrog semblait faiblir sous la puissance de Galfayar. La terre et le ciel se défiaient. Puis le balrog reprenait le dessus. En vagues incessantes, nul n’aurait pu prédire un quelconque vainqueur. Des heures de combat... Le dernier bras armé de l’Inquisition s’écroula. Frère Grégoire quittait le narthex où il s’était retranché. Abandonnant cité, recteur et détachement militaire, il grimpait en toute hâte dans son chariot. Des villageois plus braves matèrent son attelage avant les douves. Arraché de sa carriole, frère Grégoire eut la gorge tranchée, la tête hissée sur un pic. Le paladin perclus, un rire inhumain jaillit des lèvres de l’arrogante, fière de sa victoire sur les noirs calotins. Les innocents seraient bientôt à elle !... Oubliant dans sa sanglante libation, Tancrède et les deux clowns calcinés, Diablo évaporé fidèle à sa magie, Calliope le visage transpercé et désormais aveugle, la vieille Endora et Aurora dissimulées dans un caveau éventré, un clown dorénavant triste. Négligeant surtout l’embrasement du tombereau supportant la cage. La cellule en tombant avait fracturé les chaînes. Dans cette tapageuse confusion, Amaël avait disparu sous la lune à son comble... La folie guerrière s’évanouit...
       Sans Amaël, nulle espérance pour Galia d’obtenir désormais son sanglant butin. Se protégeant par d’ultimes maléfices, Galia et ses derniers saltimbanques quittèrent la ville dans les brumes de l’aube. Les villageois demeurèrent cloîtrés jusqu’à leur passage par-delà les hauts murs. Les portes de la ville furent aussitôt solidement barrées. La misérable caravane d’ombres s’éloignait dans ses lueurs verdâtres. Le bruit des roues ferrées du cortège s’atténuait sur les caillasses. Le bois des dernières roulottes craquait plus fortement dans les fondrières du chemin. Tambourins et flûtes ne chantaient plus en virevoltante musique à l’approche des sombres forêts...
       À quatre pattes, dans le silence nécessaire à son funeste forfait, l’animal avait suivi sournois le minable cortège. Galia n’entendit pas ramper la mort insidieuse. Comme né de l’irréel et soudain prenant forme, le fauve avait jailli en une nuée ardente. Tel l’éclair, il la foudroyait sur le dos, d’une patte éperonnant ses lèvres pour faire taire tout nuisible sortilège, des trois autres l’ancrant fermement sur la pierraille de la sente. Le regard de la bête traversait au plus profond les yeux son abject tyran, le transperçant jusqu’aux abîmes de son crâne maléfique. Cette hyène devait affronter sa mort en face. Personne pour lui venir en aide... le reste de la troupe avait fui à la vue du géant. De sa patte droite posée sur le sein surgirent ses lames effroyables. Elles s’enfoncèrent dans le thorax de Galia. Se contractant telles les serres d’un aigle, elles lui arrachèrent le cœur encore battant et tiède... Il possédait l’antidote à sa malédiction. Se redressant alors, il le dévora gloutonnement, laissant les entrailles en offrande au nuage de noirs vautours planant au-dessus du cadavre.
      Des rugissements déchirant la brumasse montèrent de la combe. Soudain, sa gueule se rétracta, crocs et griffes rétrécirent, et sa surpuissante musculature velue se désagrégea. Amaël se tordait prisonnier du supplice infernal. Du tréfonds de son âme, il avait mille fois imploré les cieux pour que survienne le jour béni de cette suprême mutation. Aujourd’hui, il la redoutait, craignant de n’en sortir vivant. Son crâne lui semblait imploser, son corps se fragmenter. Il étouffait la poitrine comprimée. Il ressentait le moindre de ses os et la moindre de ses tripes, comme s’ils se broyaient. Amaël s’affranchissait dans d’atroces souffrances.
     Le paladin gravement blessé, inanimé, fut laissé pour mort. À la fin du déluge, reprenant ses esprits, il s’était traîné suivant les traces de cette rouge infamie faite femme. Se protégeant des sous-bois, il avait tout vu du carnage, témoin silencieux de la déchéance macabre de Galia. Il avait tout entendu des hurlements de l’agonie jonchant les pierres et les champs. Pourtant, il s’était tu, attendant l’instant salutaire. À la nuit tombée, Amaël gisait sur le sol, anéanti. Alors Galfayar se rua sur lui, l’embrochant d’un seul geste, enfouissant telle la foudre sa lame en plein cœur. Homme impuissant, perclus, dénudé d’hostilité, au bout de ses forces et de son âme, Amaël expira son dernier désir.

       « Enfin libre, éternellement... ».
Fin



Anna – 31 Octobre 2013 © 


Texte protégé et déposé
Où vous pouvez retrouver l'extrait musical original



mercredi 31 décembre 2014

ANNA LOGON - LA MALÉDICTION D'AMAËL - 3/4

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Voix de l'Écho sur une adaptation de
Nox Arcana - Grimm Tales








« La Malédiction d’Amaël » 3/4


3
       Pressurant la cité en ténébreux présage, les ombres de Camarde promenaient sur les remparts sa menaçante silhouette. Les répugnantes gargouilles du beffroi semblaient plus charitables. Comme on marque la peste, une main invisible avait gravé les portes des berceaux à dépouiller... Quel père, quelle mère blâmer de vouloir ainsi tromper la bête et protéger sa descendance ? La ville entière exhalait la mort puante. Sous les porches et les volets clos, le vent s’agonisait en macabres lamentations. Où était-ce les plaintes craintives des cinq infortunés qui transpiraient des pierrailles ? D’itératives prières auguraient aux innocentes stèles un radieux au-delà. Les peurs primitives aiguillonnaient les âmes pieuses. Une procession au matin dissuaderait les forces du Mal. Quelques jours encore et les frères prêcheurs de la Sainte Inquisition jetteraient ces hérétiques dans les flammes de l’Enfer. Les paroissiens n’étaient plus solidaires, les désaccords émiettaient les consciences. Les natures épouvantées restaient cloîtrées, les plus téméraires conspiraient. Quelques discrètes réunions alimentaient les esprits plus naïfs. Les parents voulaient tuer la monstruosité. Pour la survie des enfants, la grâce de Dieu dicterait leur courage. Saint-Georges n’avait-il point terrassé le dragon ? Les âmes pieuses s’y opposaient, toute créature, œuvre de Dieu, relevait du sacré. Aucun homme ne pouvait se soustraire à la Table des Lois : « Tu ne tueras point » ! Croyances et confusions s’entrechoquaient, formant d’autres groupes. Certains voulaient sacrifier les garçons demandés. Se débarrasser au plus vite des maudits protégerait la ville.
-        « Des enfants, on en r’fera d’autres !
-   Sacrifions les chétifs, les souffreteux... Nous graverons une dalle de leurs noms devant l’abbatiale pour leur assurer les portes du Ciel et notre éternelle reconnaissance.
-        Faut faire une liste ! C’est qui le plus jeune ?
-        L’abbé nous donnera le registre des baptêmes...
-        Si la Margaux met bas d’un mâle, il s’ra le plus jeune !
-   La sorcière nous réclame nos cadets, jamais elle saura qu’y sont malades. Comment elle pourrait ?
-        P’être la bête saura... ?
-        Et après, que nous demand’ra d’autre c’te sorcière ? »
       Insidieusement, les crédules superstitions prenaient le pas sur tout évangélisme. Chaque parent évaluant les âges échafaudait sa liste. Espérant entière rédemption, certains plongeaient dans un fanatisme dévotieux, faisant bénir leur dernier-né quatre fois par jour en toute discrétion pour ne pas éveiller les soupçons de Galia. Quelques-uns ayant acheté la fiole de potion bleue se croyaient protégés de cette tempête maléfique annoncée. Endora n’avait-elle point vu l’avenir dans les arcanes ? C’était bien là la preuve de l’efficacité de la potion... D’autres ragots empreints de croyances païennes germaient. Il fallait baigner l’enfant trois jours avant la pleine lune dans du lait de jument primipare pour dissiper l’odeur de sang humain coulant dans ses veines. Une vieille guérisseuse jurait que l’absorption quotidienne d’un simple jus d’ortie parfumé à la rose d’officine suffisait au poupon mâle de moins de trois mois pour que tout son corps embaume la mignonne. Une assurait qu’un collier de perles d’ambre ou l’image de la vierge couronnée dans les couches pourvoirait à la protection du garçon. 
       Grosse de neuf mois, Margaux s’inquiétait... La faiseuse d’enfants avait palpé la maturation de son ventre, elle serait mère à la prochaine lune. La belle serrait les cuisses, appuyant ses mains sur son ventre pour rentrer plus profond la tête de son petit. Elle priait qu’il ne naisse pas trop vite. La peur de Galia l’enfouit avec son homme dans les tréfonds d’un souterrain. La lune aussi serait bientôt grosse. Ce soir Galia lâcherait Amaël... Avant même les Vêpres, volets et portes furent consolidés. Le silence retenait son souffle. Tous tentaient de protéger leurs couvées, les oisillons sans duvet étaient dissimulés dans le moindre trou pour échapper au féroce appétit. Dans l’obscurité, nul n’était à l’abri. Galia libéra Amaël... Un redoutable hurlement déchira le crépuscule rougeoyant. La bête bondit de la cage. Contraint, Amaël louvoyait dans les tortueuses ruelles. Une première porte céda sous ses griffes. Elles balafraient la dalle d’une cave, attisées par des sanglots étouffés. La pierre résista. Le furibond ressortit. Grimpa sur un proche muret. Sauta sur les bardeaux de la maison voisine. Le toit volait en morceaux. Le fauve dévasta l’unique accès d’une chambre. Surgit babines écumeuses. Un homme se dressait devant son aimée. La femme s’évanouit. Amaël disloqua le mari à coups de mâchoires... En une nuit, la bête avait fracassé trente-cinq maisons, déchiqueté autant d’hommes, dévoré pour moitié vingt-deux femmes... Mais croqué aucun enfant ni aucun cœur... À l’aube, Galia rappela Amaël et le renferma. Elle exultait. Désormais, tous écouteraient plus attentivement et répondraient à sa requête.
       Trois pères préférant l’excommunication et les feux de l’Enfer avaient étouffé ou étranglé femme et progéniture, avant que de se trancher la gorge. La liste des cinq en était modifiée. Au matin, rares ceux qui osaient sortir. Il leur fallait pourtant se réunir à nouveau. Les discordes s’enflaient : 
-        « La bête est repue, nous pourrions l’achever facilement !
-        Tu crois qu’c’te sorcière n’a qu’un tour dans son sac ? Elle f’ra d’autres maléfices !
-        Que fait l’Inquisition ?
-        Il nous faut tenir encore un ou deux jours, avant qu’elle ne brûle ces hérétiques
-        Oui ! Oui ! Le bûcher !
-        Le bûcher sans procès !
-  Les loups-garous ne craignent pas les flammes, s’écria un chasseur. Seule une flèche d’argent pourra le tuer.
-        Aucun d’entre nous n’a une telle arme !
-        Nous sommes condamnés à la mort, s’effondra une vieille en priant.
-        Vieille folle ! Pourquoi tous ? Elle n’veut que cinq plus jeunes !
-        P’être j’pourrais espionner Galia, rétorqua l’herboriste, et découvrir ses secrets... Après je...
-        Ouais... Pour maîtriser la bête et l’avoir à ta solde, s’écria un homme lui sautant à la gorge.
-        Sous peu, l’Inquisiteur nous délivrera.
-        Préparons le bois du bûcher !
-        Ça n’tuera pas la bête, j’vous dis ! »
       Les discussions s’envenimaient. Une bagarre suivit entre la moitié des hommes. Les esprits s’échauffaient : les courageux incroyants, les craintifs dévots, les ardents défenseurs, les perfides dépravés, les lâches toujours angoissés, les hypocrites ployant selon le vent, les vils flagorneurs... Une belle brochette d’humanité sous la coupe de Galia et son impitoyable abomination... Malgré les cruautés de la nuit, la maudite réclamait toujours son dû, cinq cœurs des plus jeunes mâles.
        Protégés sous la terre opaque, ils pensaient le sauver. Margaux serait bientôt mère. Les douleurs déchiraient. Sans le savoir, plus elle retenait l’enfant en appuyant avec force sur son ventre, plus il se présentait mal. Aucun son ne devait retentir dans l’écho du terrier. Margaux s’étouffait hurlante dans le torse de son homme qui ne savait quoi faire. La laisser seule et chercher la faiseuse ? Ou aider sans savoir ? Colin promit de revenir vite. Margaux pria le Divin, s’excusant de s’être tapie telle une bête dans le ventre de la terre. Des souffrances inhumaines lui brûlaient les entrailles. Margaux se résigna. Retroussant ses cotillons, elle ouvrit largement les cuisses. Malgré ses cris et son supplice, rien ne sortait. Colin et la vieille la découvraient inerte dans les sombres ténèbres, le périnée déchiré par son propre enfant. La vieille se pencha. La carnation de Margaux ne trompait pas son état. Les deux étaient morts. C’était une fille... Colin tomba à genoux maudissant le trop proche Malin.
       Amaël, lui, aurait voulu profiter de cette nocturne « mission » pour fuir. Divine liberté... Seuls ceux qui en sont privés savent ce mot. Mais Galia l’emprisonnait par ses maudites incantations. Et qu’en aurait-il fait puisqu’il était damné jusqu’à l’infini des temps ?...
.../...



Texte protégé et déposé
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lundi 29 décembre 2014

ANNA LOGON - LA MALÉDICTION D'AMAËL - 2/4

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Voix de l'Écho sur une adaptation de Nox Arcana - Once Upon a Nightmare








« La Malédiction d’Amaël » 2/4

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      Au crépuscule naissant dessus la plaine, une étrange caravane d’ombres s’approche dans des lueurs verdâtres. Le bruit des roues ferrées du cortège s’enfle sur les caillasses. Le bois des sombres roulottes craque dans les dévers du chemin. En guise de rideaux, des lambeaux de tissus ondoient dans les brumes. Les sons de tambourins et de flûtes virevoltent en envoûtante musique, déjà elle lèche les hauts murs de la ville. Les gardes laissent passer ces saltimbanques miséreux.
          La rumeur précède l’arrivée du cirque. Il s’annonce tel un serpent se faufilant dans les étroites ruelles où le soleil lui-même n’ose pénétrer. Des grondements plus troublants s’exhalent du sinistre cortège. À l’arrière fermant la marche, une grande cage cadenassée de lourdes chaînes sous d’épais velours est fixée au tombereau par d’énormes cordages. Des grognements sauvages montent de la cellule. Les premières festives espérances s’escamotent. Un sentiment d’étrange menace s’exsude des murailles. Une gangue noirâtre suinte enveloppant chaque pierre au passage du mystérieux convoi. La parade du cauchemar se referme sur elle-même en cercle sur le placître. À la tombée de la nuit, d’effroyables mugissements s’élèvent en face à face dissonant avec l’église dressée en silencieuse prière.
          Dès le matin, quelques enfants curieux ne peuvent résister à la tentation. Frôlant dans l’allée la cage couverte, les innocents tentent d’apercevoir la recluse monstruosité exclue de la divine bonté. À leur odeur, la cage se secoue violemment. Soudain, d’entre les rideaux surgit un énorme bras d’homme couvert de cicatrices, aux ongles longs comme des griffes à quelques centimètres de la gorge d’un enfant.
« Passez plus près et deviendrez son repas du soir. La bête a faim ! » lance Galia, sortant d’entre les roulottes, aux apeurés qui s’enfuient autant à la vue de la vieille pouilleuse que des griffes du monstre.
          Avant les clarines de la Sexte, la troupe est en place pour l’unique représentation. Dans une guérite envoilée de poussières d’étoiles, mi-gitane mi-sorcière Endora écarte pour un sou l’éventail des arcanes : « Le chemin du destin est sombre, une tempête maléfique s’annonce... Pour deux sous de plus, je vous livre la potion en puissant antidote » montrant la fiole remplie d’un liquide bleu allongée à l’intérieur d’un cercueil miniature. À l’entrée du chapiteau, en appui sur son unique jambe, Tancrède laisse pénétrer les visiteurs pour trois sous. À l’intérieur, la borgne Calliope joue du tambourin en dansant sur un filin d’acier. Au-dessous d’elle, deux clowns flandrins jonglent maladroitement avec des crânes, un troisième les accompagne frappant le cuir d’un tambour avec des os humains. Plus loin, le Maître du feu lance ses dagues acérées vers Aurora aux poignets et chevilles liés à une grande roue tournant de plus en plus vite. Diablo élève vers le ciel sa première lame qui s’enflamme aux mots étranges « Clomest vran fijud ! ». Les poignards de feu s’envolent vers la belle captive, le premier se plante à côté de sa gorge, le deuxième frôle son sein... La foule envoûtée applaudit. Tout s’accélère... À la dernière lame plantée, la roue s’embrase dans les feux de l’enfer, Diablo disparaît dans un rire satanique. La foule hurle... Les flammes cessent pour dévoiler un squelette calciné attaché à la cible. Âcre, l’odeur carbonée prenait les curieux à la gorge, certains se couvrant d’un linge la bouche et le nez, des femmes tombaient en pâmoison... Seul Diablo réapparaît plus loin dans un éclat de foudre.
          Déjà, les spectateurs s’écartent... Galia et Tancrède amènent le tombereau à la cage de velours rubescent. Les atroces grognements font vibrer les toiles du chapiteau. D’un geste magistral, Galia dévoile « La Bête »... Tous retiennent leur souffle. Un corps d’homme à la sculpturale musculature se recroqueville, ses mains immenses cramponnent les barreaux. Murmurant d’indicibles paroles, Galia lui tend un cœur sanguinolent encore battant et tiède. La bête affamée s’en empare et le dévore d’un seul coup de mâchoire. Soudain dans un terrifique hurlement, l’homme se transforme dans d’horribles douleurs. Un sombre pelage couvre progressivement son corps, des griffes redoutables sortent de ses doigts, son nez laisse place à la gueule dégoulinante de bave et de sang d’un féroce loup-garou aux yeux citrine. La foule s’enfuit telle une soudaine tornade, braillant d’avoir vu Satan en personne. Les plus effrayés piétinaient dans ce débordement de panique ceux évanouis sur le sol. Gardes et recteur furent appelés sur-le-champ pour chasser les maudits et exorciser la place. Mais Galia leur fait front :
« Vous ne pouvez rien sans notre volonté, nos sortilèges sont plus puissants que toutes vos litanies. Hasardez-vous mes seigneurs et je lâcherai la bête dans vos rues ».
« Si vous restez, c’est le grand inquisiteur qui vous brûlera ! » dit le recteur s’avançant, confiant dans sa croix levée.
« Faites-nous don de cinq de vos plus jeunes fils, et nous partirons... »
       Ainsi Galia avait compris l’infortune d’Amaël. Elle avait soigné le pauvre hère et mis dans une cage solide. La sorcière avait fini son ouvrage par quelques maléfiques envoûtements. Même sous des nuits sans lune Amaël devenait loup. Peaufinant sa sorcellerie, affamant la bête, Galia lui offrait des cœurs de jeunes garçons encore battants et tièdes dans de mystérieuses incantations. Alors les mutations se réalisaient au soleil de midi. Elle le transformait selon sa volonté le condamnant désormais pour l’éternité. Durant les courtes rémissions, Amaël pensait que la mort sous les griffes d’Yorik eut été plus douce.

       Galia attendait son écot, « C’est peu payé pour la liberté d’une ville » clamait-elle...
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samedi 27 décembre 2014

ANNA LOGON - LA MALÉDICTION D'AMAËL - 1/4

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Voix de l'Écho sur une adaptation de Nox Arcana : Night of the wolf











« La Malédiction d’Amaël » 1/4

Des profondeurs d’un si loin-temps qu’aucun n’aurait pu en donner un quelconque millésime, à l’âge des créatures maléfiques brûlant de sécheresse les cultures, noircissant les récoltes, essaimant peste et choléra, de féroces angoisses envahissaient les esprits chrétiens, attisées par les seigneurs de l’Inquisition...

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       Dans les profondes forêts de Waarkrovie, les hauts troncs se blottissent les uns contre les autres et les vents de Calcias y faufilent leurs voix lugubres, tels les gémissements d’obscures présences fouinant l’opacité. Le froid transperce les couennes, les brumes glacent tout sang humain osant y pénétrer. Les ombres ramières reines d’illusions nourrissent les peurs les plus oppressantes. Les parchemins interdits de théogonie faisaient de Waarkrovie un lieu de chaos, ultime refuge des esprits déchus.
       Solides gaillards aux bras puissants, au torse architectural, Amaël et ses quatre compagnons bucherons ne craignent ni râles envoûtants de Malhazard Fossoyeur des Ténèbres ni démons griffus ou volants. Ils se sont enfoncés dans les noires futaies, là où les arbres sont les plus vigoureux. Ils tireront un bon prix de leur labeur. Voilà deux jours qu’ils taillent avec force, étêtent les cimes, dégagent les branchages, les dépècent de leur terne écorce. Leur unique tracas se réduit aux traces d’urine et aux empreintes dans la neige d’une meute de loups aperçue la veille par Matifas. Les hommes étaient à la lisière de leur territoire. Giboin assurait qu’ils n’attaquaient pas l’homme, mais tous restaient sur leur garde. Lequel d’entre eux aurait pu jurer du fond de son âme l’absence de tout enchantement ? Chaque soir, un grand feu veillait sur le campement. Au matin, à nouveau herminettes et merlins portaient l’estocade sur les coins, les troncs s’affalaient dans de bruyants grondements. Deux chevaux tiraient les bois cerclés de lourdes chaînes. Il leur restait dix jours pour achever d’abattre la parcelle, et assurer une bonne bourse aux cinq foyers.
       Au troisième matin, Albaud avait disparu. Aucun cri, aucun hennissement, aucun vestige de lutte. Rien... Il s’était évanoui comme on souffle une bougie... Seul un sillon de sang présageait d’un sort funeste, réveillant d’archaïques terreurs où la croyance redevient loi. Ils l’appelèrent en vain... Giboin découvrit près des billes de bois une main et un morceau d’un bras figé dans la neige carminée, les doigts resserrés sur une tourne-bille. Il se pencha, la griffe était ensanglantée. Les compagnons cherchèrent aux alentours le reste du corps. C’était inutile, les traces s’arrêtaient là. Les regards inquiets se heurtaient en silence. Les loups menaçaient... Il fallait terminer et rentrer au plus vite.
       Seuls les coups de hache et les troncs qui se déchirent résonnaient dans la forêt. Flanqué d’une trompe taillée dans la corne d’un bouc, Fleuret faisait le guet assis sur une haute branche. Avec le couchant, les lumières se distendaient peuplant la forêt d’obscures chimères. Pendant deux nuits, le sommeil resta inaccessible. Les premières lueurs d'une aube si pâle leur brûlaient les yeux, les manches se faisaient plus lourds...
       Giboin s’était évaporé avant le sixième crépuscule dans un silence toujours mystérieux. Matifas trouva les carcasses de deux chevaux morts, un autre plus loin encore vivant la panse éviscérée. Matifas dut l’achever, lui pourfendant le crâne d’un coup de hache, laissant jaillir quelques morceaux de cervelle. Il fallait tout enterrer afin de n’attirer aucune férocité malveillante aux abords du campement. Si cela ne pouvait être l’œuvre des loups, quel sortilège tissait le cruel et l'invisible ? Quelles créatures démoniaques à la solde de Malhazard pouvaient disparaître en un éclair après cet infernal forfait ? Amaël décida que ce jour serait le dernier, aucun écu d’or ne méritait la mort d’un compagnon. Demain matin, ils partiraient de cette terre maudite, abandonnée du Divin. Dans une dernière hargne, les bras se firent plus meurtriers sur les troncs.
       À la tombée du jour, la faim avait poussé la meute attirée par l’odeur du sang et des putrides humeurs infiltrés dans la neige. La horde s’était approchée, tapie dans le sous-bois, attendant l’heure propice. Les hommes assis sur une pierre se réchauffaient d’une écuelle de pain trempé dans un infâme bouillon. À la lueur du brasier, leurs yeux épiaient l’ombre vacillante au-dessus de la flambée, les oreilles en alerte à chaque craquement. Ce répit fut leur dernier. Malgré la veille des hommes, les loups se jetèrent à la vitesse d’une flèche, plantant leurs gueules dans les chairs. Fleuret fut pris par surprise, entre deux monstres lui dévorant déjà le flanc, l’autre la gorge. Il fut condamné sans le temps d’esquisser le moindre geste de défense. Ses égorgeurs rejoignaient les autres dans leurs charges fatales. Matifas réussit à se dégager. Saisissant une sapie il fit front, croc contre crocs. Poussant de rauques hurlements, il les éloignait fouettant l’air de son crampon avec force. Il en tua deux, mais les fauves bondissaient vers lui en vagues incessantes. L’assaut des dents toujours plus sanguinaire que le dernier. Leurs gueules puissantes eurent le dernier mot, arrachant la moitié du visage de Matifas et lui vidant les tripes. Il n’en restait qu’un...
       Amaël affronta courageusement la meute, un par un, plantant crochets de tourne-bille, fendant les têtes et ouvrant les ventres à coups de hache. Une à une les bêtes maudites l’avaient meurtri. La lutte fut âpre, mais l’homme avait vaincu ces damnées. Chancelant, Amaël s’était réfugié près du feu, pansant ses bras en lambeaux de bandage de tissu arraché aux chemises de ses compagnons d’infortune. Il attendrait le jour pour fuir, surveillant les alentours recouverts de sang et de fragments de corps. La nuit n’en finissait pas sous l’astre ambré.
       Soudain, il apparut... Yorik, le Saigneur Pourpre du néant, le plus fort et le plus puissant loup qu’il n’avait jamais vu, telle une montagne de muscles. Jusqu’alors, Amaël croyait que ce thérien des steppes, solitaire, à la tête massive, au terrible poitrail n’était qu’une légende. Il se dressait bien là, devant lui haussé sur ses pattes arrière, debout comme un homme. Yorik s’approchait les crocs scintillants sous des babines d’écume. Plus les lunes passaient plus le fauve se renforçait de monstruosité. Amaël se releva, et lança l’assaut le premier. Aucun ne pourrait dire qu’il fût mort sans combattre... La bête surprise réagit en un éclair lacérant le torse d’Amaël de ses griffes aiguisées telles des lames, lui arrachant en un geste quartier de viande et rugissements de douleur. L’affrontement était rude, mais pas perdu d’avance. À force de courage et d’une hargne devenue sauvage, Amaël devenait plus féroce que le fauve. La lune n’était pas encore à son solstice d’hiver qu’Yorik faisait face à Amaël avec toute sa puissance. Bientôt, la lune serait au plus proche de la terre, et rien ni personne ne pourrait arrêter cette créature satanique. Seul celui qui avait un cœur pur pouvait tuer Yorik.
       Amaël ne se battait plus pour sa vie, il voulait tuer la bête les yeux dans les yeux. L’odeur du sang amplifiait sa fureur, comme si, déjà, toute humanité le quittait. Les cœurs d’Yorik et d’Amaël étaient emplis d'une même barbarie. Au matin, Yorik avait fui pour moitié mort, laissant Amaël la gorge à demi ouverte, ses plaies du corps béantes. Il s’était longtemps traîné, rampant dans les broussailles pour sortir de l'enfer. À bout de forces, avait fini dans le fossé du chemin.

       Une caravane était passée, Galia l’avait ramassé...
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dimanche 30 novembre 2014

EVE ZIBELYNE - LES AMOUREUX DE SANDUN








à Zib 




Les amoureux de Sandun

Il est une légende perdue dans les rus du ciel, entre rires et larmes, sur la terre de Guérande – celle de l’étang de Sandun, ou plutôt, celle de l’amoureuse de Sandun.
Son prénom s’est égaré dans les gerçures des temps anciens, mais il n’est pas besoin de définir ce qui est. Venez à Sandun, son empreinte s’y dessine, vous la reconnaîtrez, lors que vous me lisez. La révolution gronde et si les chouans, à plus de six mille mirent à mal la nouvelle République, la noblesse connut ses heures de déchante et de larmes.

Les chouans de Vendée sillonnaient la contrée en ces temps troublés d’affrontements. La Bretagne était belle et l’or coulait dans les pichets, à peine troublé. Les hommes fiers frappaient d’estoc et les femmes pleuraient. La demoiselle de Sandun était de celles-là, qui craignaient chaque jour le fracas des sans-culottes aux hauts de chausse des servants du roi.
Son amoureux, bien né, était de ceux-là. Il ne dédaignait pas se frotter aux corvées, remonter les cordées et botteler le foin et se frottait souvent aux gueux des galetas – nés comme lui sur la terre fertile, aux falaises rouges, parfois.
Ses amis d’autre endroit l’avisaient, bons enfants, des menaces tricolores en pays penestois. Il s’éclipsait alors en terres fortifiées sur le roc haut perché d’ar Roc'h-Bernez, fief encore sûr au roi. La fougue impétueuse du jeune homme se lassait vite du goulet majestueux de l’estuaire et du calme de la Vilaine. Il s’élançait alors, d’un galop, droit devant vers sa belle, sans souci, ignorant du ricanement des armes et du lys, le sang.
Il s’en fût, des batailles auxquelles il échappa, et son impatience lui valut la vie sauve, à l’assaut d’ar Roc'h où cordes et cris résonnent encore aux joints des pierres lavées. Sa chance était telle que sa réputation dépassa la région, de Nantes à Quimper, de Brest à Saint-Brieuc, et suivant la Vilaine de l’Oust au Meu, de la Seiche au Don, du Semnon à l’Isac – courant en pays chouan telle une traînée de poudre à canon.
Sa belle en fut bien chagrine, craignant plus chaque instant à mesure que sa renommée grandissait, frémissant plus, chaque nuit, aux bottes des chouans qu’il recevait. Ses amis, pour les foins, se passèrent de lui. Ils en prirent quelque ombrage et, chafouins, omirent de l’aller quérir lorsqu’en grandes manœuvres la République se mit.
Il ne s’en soucia point et alla de sa mie, à l’envi, vanter tous les délices aux chouans ébahis. La cour de la demoiselle s’en vit agrandie, à l’effroi qu’en toute raison elle avait. Les batailleurs aguerris retrouvaient quelque lustre aux pieds d’une dame qu’ils savaient illustre.
Las ! Les gueux, aventureux et autres besogneux en firent babillage et l’on sut partout qu’en pays de Guérande, les suppôts du roi faisaient affront au bon peuple et à sa révolution.
Dès lors, la machinerie huila ses rouages et s’ourdit le complot.
Un soir d’été limpide où crissaient les grillons — à l’heure où rougit le ciel et lors qu’en sa demeure la belle donnait fête, sa maisonnée, assaillie, fut réduite au silence. Les genêts s’en trouvèrent écarlates de honte et périrent en un instant. Les hortensias, livides, en perdirent la tête et les bruyères seules, en leur modeste parure se tinrent pour témoins de sinistre devanture. L’assaut fut donné de toutes les fenêtres et les chouans, si vaillants, pourfendant les manants s’écroulèrent sous le nombre, rendant sang aux tapis et tripes au couchant. Les oiseaux s’enfuirent vers le large, laissant place à ceux de proie. Une mare sur le chemin accueillit avocettes élégantes, aigrettes et pluviers, laissant aux mouettes les embruns des rochers. Le ciel nappé de nuages tira le voile sur la demeure, mais le cri de la demoiselle s’étira jusqu’à l’estuaire, s’effilocha par les criques et les anses aux heurtées de granit, par les falaises rouges, en crescendo de honte et de douleur à l’odieux arc-boutage des gueux blanc-bleu. Le rouge fut sa couleur, maculant sa blancheur. De tous les outrages qu’elle subit, elle ne dit pas un mot et s’en fut dans la nuit en tout abandon, délaissée, déflorée et grosse jusqu’au cœur du fruit de leur labeur.
Jamais elle ne dira, au croisé de leurs yeux qu’elle en a reconnus, des natifs de ces lieux. Leur fureur lubrique nourrie de bolées d’or n’a pas eu chagrin pour celle qui, naguère, leur servait à boire aux assemblées, au bras de cet ami, par la grâce de la guerre, ennemi devenu. Elle a lavé sa honte à l’océan rageur, ouverte au ressac qui l’a rejetée sur la grève, inondée de pleurs. Elle l’a cherché, lui, son cœur empli de craintes pour l’aimé en péril, car c’est lui qu’ils cherchaient, Lui, pour le tuer.
Elle a couru sans fin, de Guérande à Pénestin, taillant dans les fougères odorantes à travers bois et champs. Elle a laissé sa trace sur le sable humide des plages, déchiré ses pieds nus aux rochers, sous la lune étonnée de cette ombre blanche aux bras qui tournoyaient.
Ivre de folie et de chagrin, elle marchait de nuit au matin, sans larmes, et les gueux s’écartaient devant cette folle sacrée que rien n’arrêtait. Car la honte qui tenaille les tenants de la trahison leur rongeait les entrailles et nul ne se prit d’en finir une bonne fois.
Elle a suivi sa trace, celle de Lui, son amoureux en fuite qui par les bois sans fin la cherchait, Elle, son âme aimée qu’il n’avait su protéger. Il avait su les cris. Il avait vu le lit, les cadavres éventrés, les têtes découronnées. Chaque corps il a soulevé, autant de coups de pistolet, craignant de l’y trouver. C’est une fillette qui lui a conté avoir vu sa dame, en chemise se fondre dans la nuit sans fond. Pris d’un espoir insensé, il s’est résolu à la trouver et, du matin à la nuit, bravant les gueux et les estourbis il a suivi les sentes, les ruelles et les rochers, haranguant marées, crabes et mouettes, les sommant de lui montrer la route vers le cœur de sa bienaimée.
De Pénestin à Guérande, il a marché sans fin, les yeux noirs de supplice, le ventre serré de colère, sous la cime des pins. Dans le creux des fougères parfois, il a cru la trouver, reconnaître sa couche, humer son parfum, mais en vain. À la nuit, épuisé, il tombait en pleurs sous le couvert des forêts, gravant, éperdu, ses affres aux troncs puissants des géants chenus.
C’est ainsi qu’un soir, il a chu, s’abreuvant à la mare de Sandun après une longue marche qui le laissait fourbu.
Las ! Dans son harassement, il n’avait pas vu le pas des chevaux dans la vase, l’empreinte des bottes imprimée en outrage sur les herbes couchées, brisées, piétinées. La lueur des sabres sous la lune, reflétée sur l’eau sage, lui ouvrit les yeux, mais bien tard. Quatre gueux mal fagotés dans des uniformes si bleus lui firent fête à coups de lame et de mousquets qu’il contra tant et si bien que trois, il trancha ! Le quatrième, bon couard, se prit à bramer si fort que le val en trembla et s’empressa de pousser loin la vocifération qui sentait fort la pisse et l’effroi.
Las ! Une escouade proche s’y rua et sans plus réfléchir, pourfendit le capon, le chie-en culotte, dépouillé dans l’affaire de l’uniforme si bleu qui ne lui seyait guère. L’alangui se crut un instant sauvé, mais la clameur qui résonnait encore vint tout droit aux conscrits. Forts de son entendement et de la duperie, ils en furent bien aigris et entrèrent en furie.
Loin, trop loin, Elle, avait compris. Qui d’autre que son aimé aurait pu susciter tant d’épouvantement en son pays ? Il était donc ici, à Sandun où elle passait pour la neuvième fois, Sandun, où il avait, près de la mare aux vœux, scellé leur amour d’un baiser sur les yeux.
Elle court à perdre haleine, prise d’un effarement immense. Le fracas de la troupe la pousse vers le guêpier, vers Lui, qu’enfin ! elle va retrouver.
Le galop des haridelles fuyant sur l’eau la fait défaillir. Elle surgit, silhouette blanche en lambeaux sur le champ de bataille et le voit, étendu, les yeux vers le ciel, moucheté par la mitraille. Elle crie, il tressaille. Couchée sur son côté, de sa bouche elle reçoit son premier baiser, terre bleuie de fer en épousailles. Ses yeux tournent au vitrail – elle le serre, le réchauffe, le couvre de ses cheveux en oriflamme, ferme de ses doigts les plaies et fredonne à son oreille une comptine tendre. Il chuchote sa flamme en répons, il s’étiole, et d’un dernier baiser reçoit pour le passage le souffle de ses lèvres en ultime message.
De son corps nu elle a couvert le sien, les yeux rivés au ciel, y cherchant son étoile. De sa robe blanche en marée étale elle a paré sa couche en linceul à son âme. Elle s’est évadée, perdue dans les nuages, le lait de ses seins en fleuve intarissable. Le lait de son ventre meurtri a submergé les prés et noyé les vilains. Le lait de sa vie a enfanté la vallée de cette eau limpide qui plaît aux oiseaux. Aigrettes et avocettes s’en firent gorges chaudes et de ce jour, naquit une blanche oiselle, la Tippistrelle picoreuse qui parcourt les rives sur ses fines pattes rouges dans une quête sans fin, celle de Lui, celui qui jamais ne reviendra.
Car le fruit de cette eau est celui de la forfaiture des traîne-misère, des assassins, des faucheux et si la mare originelle s’étend désormais jusque vers la Brière en chevelure dense aux reflets de ciel bleu, hébergeant hérons et busards au même gîte que la gracieuse Tippistrelle, ce n’est pas qu’Elle a pardonné, non. Elle veille sur la rive, le corps offert en roc, glorieuse en manifeste pour nous dire qu’en ce pays comme ailleurs, la femme est et restera.
Ses seins se sont creusés pour avoir trop pleuré mais ils gardent de cette eau pour les plus assoiffés. Son ventre arrondi s’offre au siège des promeneurs pour une rêverie dont je sors après vous y avoir promenés.
Les blanches Tippistrelles suivent les sentes sur les pas des amoureux, du couvert des fougères aux cosses des genêts, rappelant leurs origines aux hommes de ce temps, fruits de guerres fratricides et d’amours meurtris, et les hampes roses des herbes folles qui frissonnent de nos émois déclinent au vent les strophes d’une rengaine que l’on entend, parfois, quand se tend l'étole du couchant.




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De Guérande à Pénestin
Je t’ai cherché en vain,
Mon tendre, mon aimé, digue dondaine
Tu gisais à Sandun.digue don don.
Le cidre coulait à flots
Aux mâles râles, sanglots
Des lames, aux sangs mêlés, digue dondaine
Au baiser de la faux, digue don don.
Le cidre coulait à cris
Je te cherchais en vain,
De Guérande à Sandun, digue dondaine,
Tu gisais, mon chagrin, digue don dé.
Mes cheveux sur tes yeux bleus
L’horizon dans les miens
J’ai vu mon ventre rond, digue dondaine,
Et les pleurs de mes seins, digue don don
Et la terre de mes larmes
A uni nos destins
Mon tendre, mon aimé, digue dondaine,
Une Tippistrelle est née, digue don dé. Bis



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