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mardi 25 novembre 2014

MARCEL FAURE - 0161 à 0165 de La danse des jours et des mots


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Mercredi 29 février 2012 

Je grimpe à l'échelle du siècle. Toujours quelques barreaux de retard. Alors je me déleste de quelques regrets. Ma progression reprend, plus vive, plus gaie, plus consciente. Maintenant je peux parler avec l'homme qui bataille sur l'échelle d'à côté, que j'encourage et qui m'aiguillonne.
Plus haut, la lune est prise, abandonnée, reprise et à nouveau délaissée. Aucun intérêt, trop cher. Allez mes Pierrots, sur ce coup-là nous avons de l'avance, grimpons. La Poémie est proche.



Jeudi 1er mars 2012 

Urgent : New York.

Au secours, au secours !
Ils veulent me tuer.
Je veux rentrer en France,
Vite.
La nuit,
Seule dans mon île,
J'éteins la flamme.

Mais ils savent où je suis !
Trop rouillée pour courir !

En mon nom,
Ils ont pu acheter des armes.
Et maintenant,
C'est contre moi qu'ils veulent s'en servir.
Au secours !
Venez me chercher.
Je veux rentrer en France.

Signé : la statue de la Liberté.



Vendredi 2 mars 2012 

C'est donc le prix de leur bonheur, là-bas, outre-Atlantique, pouvoir s'entretuer librement dans les écoles, ou ailleurs, partout. Avoir le droit de porter une arme parce que la liberté absolue, c'est la jungle.
Au passage, ils exportent leur ferraille dans le reste du monde, avec pour tout message, cette conception sanglante de la liberté... et du libre échange. Les grands mots sont lâchés. Les grands fauves aussi. Sournoisement ils guettent.
Chez eux, des pacifistes aussi donnent de la voix. " Peace and love ". Les sourds constitutionnels n'entendent rien. Ils sortent leurs griffes, conspuent, conspirent, manipulent. Et si leur fils meurt, sous la balle libre d'une arme acquise en toute liberté, comme les crocodiles, ils versent une larme.
Quand ils ont faim, les prédateurs mangent aussi leurs enfants.



Samedi 3 mars 2012 

Je ne suis sans doute pas le seul à avoir reçu ce S.O.S. Personne ne l'a relayé sur les réseaux sociaux. Pas de buzz comme ils disent. Rien.
Les statues ne parlent pas, ne peuvent pas envoyer de message, ne pensent même pas. Rodin, et son Penseur, qu'en faites-vous ! D'ailleurs les sculpteurs modernes le savent. Plus d'hommes ni de femmes dans leurs œuvres. Des colonnes, des symboles à l'esthétisme épuré qui s'élancent à l'assaut de l'espace public et, s'ils ont un doute, pour éviter tout dialogue, une bonne concrétion. Et hop, on ne pense plus, on admire, on attend, on cherche une direction. Un doigt géant, privé de corps nous indique le ciel.
Heureusement il nous reste le zouave du pont de l'Alma. Lui au moins sait nous conter la Seine, les bateaux et les hommes. Il s'inquiète chaque fois qu'une crue risque de le noyer, et nous avec lui.



Dimanche 4 mars 2012 

Je guette à la fenêtre. Ce jour mordra peut-être à mes lignes de mots, lancées comme des appâts dans le sillage des jours. Levant les yeux, je m'essaie à la néphélomancie. Pas un nuage à l'horizon. Je reste sec.
Je plonge dans Montale pour rouler mes galets dans ces rivières qui fredonnent l'Italie. Aucune fontaine jaillissante, aucun signe.
Attentif pourtant à la moindre fissure, au moindre épanchement, mes doigts noués ne laissent rien échapper. Je dois avoir une ardoise qu'il me faut payer avant de poursuivre.
Ah oui, les voisins, le café. Il est quinze heures, je change d'étage.







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1 commentaire:

  1. Je me délecte toujours de la plume sensible et profondément humaniste de Marcel, j'aime les textes qui amènent à une réflexion, c'est un bien triste constat qui nous est dressé, un constat juste et effrayant ! Foi de Gavroche CHAPEAU BIEN BAS à tous les deux ! BRAVOOOO !!!

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