Jeudi 24 mai 2012
En te nommant sans cesse, je ne sais plus que ton nom.
Lloydia, et ta double consonne plus douce qu'une voyelle.
Dehors, la lumière du soir décline l'horizon des collines
alanguies.
Lloydia enveloppée dans le pourpre, bientôt reine de la nuit.
Mes lèvres dans un murmure, Lloydia.
Vendredi 25 mai 2012
J'ai
toujours eu horreur du téléphone. En dehors du fait qu'il sonne
toujours au mauvais moment, lorsque je réponds, je m'entends dire
nombre de banalités, voire de bêtises. La voix de mon correspondant
me paraît irréelle et je ne comprends pas toujours distinctement
son propos.
Lloydia
me dit que je deviens sourd. Je n'y crois pas trop. La réalité
d'une présence physique me manque et j'écoute distraitement des
propos parfois très graves, qui me bouleverseraient si je recevais
un courrier, mais là, rien, je suis une pierre, insensible à tout.
Pourtant, s'il le faut, je saute dans mes chaussures, je me précipite
vers la voiture, et je conduis comme un fou et sans aucune prudence
vers l'ami ou le parent qui appelle au secours.
Lorsque
j'arrive chez lui, au comble de l'inquiétude, je le trouve
finalement assez guilleret. Je me sens un peu trahi et je regrette ma
précipitation.
Mais
imaginons un instant que je découvre mon ami au bord du gouffre, je
dis alors merci à ce foutu téléphone et peste contre mon
correspondant précédent qui occupait la ligne sans avoir rien à
dire.
Furieux
je me penche à nouveau sur mon écrit interrompu et je pèse tant
les mots, que souvent, je laisse en paix la feuille blanche et qu'ils
me restent sur l'estomac.
Samedi 26 mai 2012
Entendu ce mot dans un commentaire télé : infobésité. C'était
bien sûr à propos de cette orgie d'information dont nous sommes
saturés jusqu'à l'indigestion. Il se rapporterait d'abord à
l'information numérique et serait d'origine québécoise. Un
internaute fait cependant remarquer que de tout temps l'homme a eu
une masse d'information à gérer et que notre cerveau doit faire des
choix depuis toujours.
Cette
nécessité que nous avons de nous situer par rapport au monde et aux
autres, nous pousse toujours plus à vouloir savoir et comprendre.
L'infobésité serait donc une maladie de la connaissance que l'on
pourrait traduire par " avoir les yeux plus gros que le cerveau
".
Dimanche 27 mai 2012
Je
mâchouille indéfiniment la même idée, la présence centrale du
bonheur dans toute vie. Je ne parle pas de l'aptitude au bien être,
parfois poussé jusqu'à l'angoisse, mais de ce plaisir que j'éprouve
à tout faire pleinement.
Comme
nous tous, je subis aussi nombre de conventions mais je n'aspire à
rien d'autre qu'à cet instant où je suis nuage, haut, très haut,
mais porteur de pluie et d'espoir. Oui, la pluie que certains
redoutent, mais tellement essentielle à la vie.
Je
perds la journée entière à ne rien faire d'autre que m'effilocher
en petits brins de bonheurs. Et je m'endors à ton clair de cœur.
Lundi 28 mai 2012
Ce
catalogue de possibles qui s'enroule sur lui-même sans jamais se
répéter, je le consulte et me sers. Ton sourire encore, qu'un
oiseau curieux subjugué, posé sur le rebord de la fenêtre,
contemple à loisir. Tu lui tournes le dos, il s'envole.
Cette
chanson à capella qui parle d'Italie et qui vient de si haut, comme
tombée du ciel.
Soudain
un pan de souvenirs. Ma chambre d'enfant, coincée entre l'échoppe
d'un coiffeur qui susurrait des airs langoureux à longueur de
journée, en coupant les cheveux de ses clients et un bistrot, où le
soir, Tino, noyant sa mélancolie, ébranlait le mince galandage de
sa belle voix de ténor, pour ressusciter son terroir natal. Mes
oreilles résonnent encore de ces lointaines mélodies qui m'ont
servi de berceuses.
Ce
catalogue plein d'interférences, impulsions de la mémoire qui font
irruption, laisse filtrer suffisamment de lumière pour occulter les
traces trop monotones. Je renoue le fil du jour avec la colline qui
secoue doucement son feuillage printanier. Elle imprime ma rétine
étonnée de toute cette vague verte et fraîche.
Jusqu'à
l'ultime épuisement de mon souffle, je déviderai toutes ces
histoires parallèles inscrites en moi, les possibles sans cesse en
mouvement.
A chaque fois que je lis les mots de Marcel, j'ai l'impression de faire du voyeurisme, de pénétrer à l'intérieur de ses mots et c'est un voyeurisme exquis ! J'aime beaucoup cette définition si juste de "infobésité" et toujours ses sublimes mots aériens qui virevoltent, tournoient en un ballet poétique "je m'endors à ton clair de coeur" CASQUETTE BIEN BIEN BAS à tous les deux ! C'est toujours un instant suspendu que cette danse des jours ! Magnifique ! Comment s'en lasser ??? Merciii pour ce beau partage ! bisous et à bientôt !
RépondreSupprimerIl est vrai qu'elles sont jolies les fenêtres que Marcel nous entrouvrent ! Merci Eponine de tes visites toujours si chapeautées d'enthousiasme ! Bisous
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