Retrouvez la vidéo sonore de la danse en cliquant
La
main sur la poignée de porte. Aller prendre le vent. Rassembler des
éclats, des sons. Jauger le bruit des pas. Sonder la fraîcheur du
matin. Prendre le tronc d'un arbre entre ses bras. Se laisser
apprivoiser par un sourire.
Peu
importe le choix du lieu, seulement suivre cette petite musique
interne. L'espace est organisé ici par la vigueur de la nature, là
par la volonté des hommes. Se mettre en disponibilité, tous sens en
alerte. Se poser sur un banc ... Sur une pierre ... Assis par terre
... Prendre racine.
Un
oiseau s'approche, me regarde de biais, attend quelques miettes de
moi. Je n'ai rien. Il volette de-ci de-là, picore le sol de son bec.
J'ai pourtant l'impression qu'il n'y a rien à manger ici. Nous nous
sommes adoptés tous les deux et pendant qu'il lisse les plumes de sa
queue, je l'observe sans bouger.
Tapie
dans l'herbe, une masse verdâtre progresse lentement, une reptation
qui n'intrigue pas mon nouvel ami. Inquiet, je surveille. L'approche
dure, dure. Tout près maintenant, je distingue sous une bâche verte
l'œil avide d'un objectif photo. Clic, re clic, l'oiseau s'envole.
L'informe
reptile se redresse et me toise, furieux d'obtenir seulement deux
clichés de cet oiseau paraît-il si rare et qui ne se laisse pas
approcher facilement. Puis il s'en va jaloux et ronchonnant.
Etrange
comme la désillusion nous rend peu aimable, alors que je ne doute
pas un seul instant que cet homme vert avec ce troisième œil
cyclopéen, sait faire preuve de patience et aime la nature tout
autant que moi.
Mercredi 19 octobre 2011
Après
relecture, je ne suis pas satisfait de ce que j'ai écrit hier. Le
début oui, mais ensuite. L'oiseau en complicité, tu te prends pour
François d'Assise bonhomme. Pourtant l'oiseau était bien là, le
photographe aussi, mais mon texte est flou, jauni, raté. Et cette
conclusion, n'en parlons pas. Pourtant, c'est moi, je ne renie rien.
Suggérer
plus que dire. Derrière le personnage principal, le paysage, ou
seulement ce détail que l'on distingue ... au fond ... à droite...
oui, le pot de glu.
J'ai toujours du mal à faire décoller l'image qui noircit ma page.
Alors je rame pour que prenne forme ce qui me taraude.
Ce
matin, dans la salle d'attente de notre médecin, plusieurs visiteurs
médicaux. Nous passons après eux. Aïe, l'ordonnance va être
salée. Nous restons trois quarts d'heures dans ce cabinet. Et le
toubib parle, parle ... pas d'ordonnance, finalement tout va bien.
C'est ainsi qu'il faut dire maintenant quand l'état de santé de
Lloydia est stationnaire.
Bien
rangé dans l'album photo des souvenirs, Lloydia sous un chapeau qui
lui mange les yeux. Là, dans le prolongement de son doigt, un
aconit. Toujours quelque part une fleur, comme sous ce balcon
débordant de géraniums, ou à table avec ce bouquet qui lui masque
une partie du visage. Lloydia ... une fleur ... le bonheur
instantané. Pas besoin de lui réclamer un sourire.
Jeudi 20 octobre 2011
Un
sourire de plus ce matin, celui de Mag sur Internet Sur ce site où
je publie (publiais) mes poèmes, je lis beaucoup les autres, dont
Un4gettable. Derrière ce curieux pseudo se cache Mag. Régulièrement,
je commente ses écrits. Beaucoup de nostalgie, doublée de
romantisme dans ses textes — elle aime Musset —. Elle sait
apporter le réconfort que beaucoup attendent. Lilia, Chris, d'autres
encore avec elle, tous jouent souvent les infirmiers du cœur et de
l'âme.
En
effet beaucoup de "poèmes" ne sont que déchirements,
amours déçus, vieilles rancœurs ressassées, décès non assumés.
La solitude cette vague qui les submerge, dire au monde sa révolte,
ses peines, ses angoisses. Crier sur les toits sa détresse.
Quelques
mots, un peu de baume pour panser les blessures sous ces textes, qui
souvent n'ont de poétique que le nom, montrer un peu de compassion
et parfois éviter le pire. Sur un autre site, une personne avoue que
c'est grâce à ces commentaires qu'elle ne s'est pas suicidée.
Quelle victoire sur la mort et la désespérance.
Mais
le sourire de Mag ce matin, qui me consacre un poème, et c'est le
visage de la jeunesse heureuse qui illumine ma matinée. .
Si
un poème vous était entièrement dédié, comment réagiriez-vous ?
Et voilà que Lilia s'y met aussi dans son commentaire ... Moi je
suis bouleversé, l'émotion gonfle ma poitrine, et je pleure
doucement. Pour le coup, je suis déconnecté par ce bisou si
généreusement offert.
Ce
n'est pourtant pas la première fois que je me retrouve dans cette
situation. Chris déjà, il y à quelques jours, toute une strophe.
En remontant le temps, loin derrière moi, Hubert à qui je garde
toute la tendresse de mon amitié, avait sévi
:
Prince
des mots en l'air et de leurs cabrioles
Toi
qui eus
le bon goût d'avoir en ta maison
Invité
tes collègues nombreuse farandole
En
ton honneur on a changé cette chanson.
...
Pourtant
vieux salaud si on a bonne mémoire
Tu
as gueulé partout qu'ils te faisaient suer
Passablement
tous les gratouilleurs de guitare
Aussi
en beau joueur on va pas s'en priver
...
D'ailleurs
si on te parle avec nos chansonnettes
C'est
parce que nous caressons l'espoir secret
De
te gonfler démesurément les burettes
En
toute sympathie Marcel tu nous connais
...
Choucrouteur
notre ami que ces vers te profitent
...
Mais
pour cette soirée tout ce que l'on espère
C'est
qu'ta choucroute sera meilleur' que cett' chanson.
C'était
en 1982. Déjà j'avais pleuré, et mes collègues effondrés de rire
devant ma réaction.
Alors,
merci Magalie, merci amis qui me commentez au fil des jours. J'ouvre
la fenêtre, vous êtes là tout près. Vos habits d'éloquence se
jouent de la densité de l'air.
Vendredi 21 octobre 2011
Salle
d'attente. Encore une fois. Cela ne me pèse pas. Des soins de
confort cette fois. Lloydia, toujours je la guiderai où elle voudra.
Dans cet intervalle neutre d'une vie, certains s'ennuient, moi pas.
Le
corps se repose, mes yeux divaguent sans se fixer où alors
s'attardent sur les chaussures de mon voisin. Très agitées, les
chaussures. Son visage que j'observe à la dérobée est impassible.
Mais chaque doigt de pied doit se jouer la comédie de
l'indépendance. La pauvre godasse se tortille dans tous les sens,
marque une mesure imaginaire, ne cesse de brandir le drapeau blanc de
l'armistice. En vain. À l'intérieur la sarabande continue, sans
aucun répit.
En
remontant jusqu'aux mains, nouveau spectacle. Une chorégraphie de
ballerines. Et je te croise, recroise, décroise les phalanges.
Chacune sautille sur les cuisses utilisant toute la longueur de la
scène pour finalement prendre appui sur l'accoudoir et redresser
tout le corps que cette pantomime affaissait par petites touches. Une
chorégraphie à la Botero. Boudinés les doigts.
Lloydia
sort de son rendez-vous. Nous nous tenons la main. Une habitude de
vieux amants devenue très pratique pour les évitements. Les
escaliers trop sombres. La rue encombrée, le trottoir et ses crottes
de chien,
la rive de l'autre côté de la chaussée, difficultés multiples que
doivent surmonter les mal voyants et les aveugles. Seule elle ne se
débrouille pas trop mal. Je préfère être là.
Samedi 22 octobre 2011
Le
jardin entre dans la maison. Deux amis. Panier qui déborde ...
derniers légumes ... dernières fleurs. Des cosmos, aquarelle
blanche et mauve au feuillage vert et découpé. Une magnifique
couronne de ligules enserre de minuscules et nombreuses fleurs
tubulaires, les seules fertiles.
Nos amis racontent
le soleil sur la chapelle du mont Lozère, les pierres plantées près
de La Fage, le pré pentu au-dessus de Florac, une marche d'automne
qui recouvre en partie une randonnée que nous avions faite ensemble.
L'eau de nos gourdes dans la gorge et nos jambes plus jeunes plus
légères à arpenter la rocaille et la mousse.
Suivre
un méridien et faire le tour du monde avec l'envie du désir de
l'autre. S'asseoir sur la pierre, prendre langue. Partager un
croûton, une émotion. Jamais vraiment seul, mais dépouillé et
vulnérable, offert à la soif d'un inconnu. Entendre des mots sans
comprendre leur sens et savoir au fond de soi qu'ils ne sont que
douceurs partagées ...
Je
ne suis qu'un utopiste sédentaire, qui ne fera jamais que le tour de
la même colline. N'empêche, j'ai des jambes dans la tête et mes
muscles se nouent à l'idée de franchir plaines et montagnes,
jusqu'en Patagonie. Guettant à ma fenêtre, les yeux dans le cosmos,
jamais je ne serai privé d'étoiles.
Textes protégés et déposés
sur le site iPagination
ci-dessous
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire