CLIQUER SUR LA VIDÉO SONORE
Lundi
7 novembre 2011
Perdu dans le grouillement des
corps qui se bousculent, parfois j'ai soif d'arriver à la surface du
monde. Ermite inondé du vacarme incessant, j'ai peine à me
concentrer. Je cherche une impossible idéologie de la perfection,
celle qui ne délivre pas de diplôme et que je pourrais opposer à
celle du confort de l'objet.
Je voudrais être cette racine courageuse qui attaque la muraille de
pierre pour y installer un brouillon de vie.
Ne rien entendre ... s'acharner à être ... plus humble qu'un
lichen et pourtant tout aussi résistant. Alors, j'écris. Avec
obstination, avec acharnement, j'écris, peut-être comme un pied,
mais avec la joie de me surprendre et la possibilité infinie de me
reprendre sans cesse pour me mettre à jour avec moi-même.
Je suis désassemblé et m'assemble sans cesse pour me tenir debout.
Mardi 8 novembre 2011
Chuchotements
... la nuit ... les secrets ... des nouvelles rien que pour toi ...
dans ton oreille ... Bouffées d'amour, de désirs. Ta respiration.
Dans
ton sommeil, surprendre tes soupirs. Ta main qui me cherche. Est-ce
bien de moi dont tu rêves ? L'odeur des pins qu'exhale un
brûle-parfums sur la table de nuit.
Nos
dépouilles de civilisés posées sur une chaise, disposées en ordre
de bataille pour nous enfiler dès le réveil. Quelque part, une
horloge fait son travail. Je débaucherais bien quelques heures pour
mon usage personnel. Pour en faire quoi ?
Parcourir
des chambres glacées, réchauffer un lit d'une bouillotte, tenir une
main qui tremble, en poser une autre sur un front en sueur, tirer une
couverture, soulager, soutenir, agripper, réconforter, déposer sur
chaque oreiller un baiser, pour qu'il soit plus doux, allumer le
chauffage central sous les portes cochères, retenir le couteau de
l'assassin. C'est la nuit. Tout est possible. L'ombre dissimule le
bien et le mal et les mots que je jette, voudraient faire pencher la
balance.
Quelques
heures pour croire vraiment que tout est possible. Au bord du
précipice, le moindre brin d'herbe où se retenir, peut nous sauver.
Mercredi 9 novembre 2011
Spirale
enchevêtrée des dernières feuilles dans le vent. Ciel pâle,
grisonné de nuages. Claquement sec d'un volet mal arrimé. Lumière
douce et filtrée du soleil. S'effacer sur la pointe des pieds. Ne
pas rompre cette quiétude tourbillonnante.
Passe
un autobus vide. Repasse dans l'autre sens, toujours vide. Avec tous
ces kilomètres avalés, le chauffeur pourrait faire plusieurs fois
le tour de la terre. À quoi pense-t-il, seul, rivé à son siège,
dans ce bus qui tourne tristement comme un manège sans enfants.
Une
femme court de l'autre côté de la rue. Elle lève le bras pour
intercepter le chauffeur. Sur cette ligne, les bus se comportent
souvent comme des taxis en maraude. Ils s'arrêtent à la demande. Je
l'ai expérimenté bien des fois. Ce n'est pourtant pas la règle.
Le
chauffeur et la femme se sourient, heureux de l'autre. Un sourire ...
le meilleur des passeports. Une façon de dessécher les rides.
Quelques mots ... l'automne, les inondations dans le Var. Pas le
temps de développer, Elle descend au prochain arrêt. Chuintement
des portes. À demain.
Jeudi 10 novembre 2011
Les
objets, les paysages, je ne sais pas les décrire. Les nuages par
exemple, leurs couleurs, leurs formes. Grossièrement oui, mais dans
le détail ... et je ne sais même pas les reconnaître quand ils
passent dans le ciel. Oui, bien sûr, cumulus, stratus, cirrus,
nimbus et tous leurs composés, cumulo-nimbus et toutes ces nuées
plus ou moins bien définies qui regorgent dans la nomenclature
météorologique, seulement des noms. Ah si j'étais un Stradivarius,
quelle belle interprétation divine je pourrais donner, de cette
masse toute en légèreté, mais nébuleuse et fuyante.
Grandiose
beauté que toute cette eau en suspension, cette menace, cet espoir,
ce trouble indéfini, cette confusion inexprimée d'où surgit, comme
un fou, un dieu en furie tempêtant à tous les diables. Nuage qui
obscurcit nos vies, ce coup que le ciel nous porte et qui parfois
nous emporte.
Allez,
je m'embarque sur mon cliché de petit nuage, cet autobus pour mon
coin de ciel bleu. Au fait, bleu, le ciel ? La transparence de l'air
une trompeuse apparence ? Comment dire ce bleu si particulier qui
n'arrête pas le regard !
Soudain tu as peur. Je le vois à ce nuage dans tes yeux. Vite, je
l'efface d'un sourire. J'étais trop loin de toi, tout là-haut, à
divaguer entre le gris et le bleu. Alors je m'arrime à cette
éclaircie qui vient de s'ouvrir.
Vendredi 11 novembre 2011
—
Alors mon vieux, comment ça va ?
La
mesquine dérobade de la jeunesse ... Qui se souvient du jour où
elle a fait défaut ! Très tôt déjà les enfants disent " Mes
vieux " et quand ils commencent à vous appeler Papa ou Maman,
avec cette tendresse nostalgique dans leur regard, ça sent le sapin.
Et
je ne suis pas votre vieux d'abord ! Mon âge n'autorise pas, non
plus, cette tape familière sur mon épaule. Je n'ai jamais été
jeune, le saviez-vous ? Alors, cette disparition annoncée ou
effective depuis longtemps, m'importe peu. Je viens de nulle part.
C'est pour cela que toujours, ici, je serai neuf.
—
Alors ne fais pas chier, gamin, je vais bien mieux que toi. Tu tiens
la muleta, mais c'est toujours moi qui plante les banderilles.
Textes protégés et déposés
sur le site iPagination
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire